"Le Temps de l'innocence" d'Edith Wharton : quand la musique n'adoucit pas les mœurs
Résumé
Le proverbe d'après lequel « la musique adoucit les moeurs », sans doute hérité d'Aristote 1 ou de Platon 2 , suggère que l'art de Chopin serait un vecteur de savoir et d'harmonie parmi les hommes et les femmes. Cependant, si l'on se rappelle que l'un des plus cruels dictateurs romains était amateur de chant 3 , si l'on se souvient que l'on torture en musique dans certaines prisons du monde 4 , si l'on garde en mémoire que le régime nazi portait Wagner 5 aux nues, il est d'emblée permis de douter de la pertinence d'un dicton dont le bel optimisme est battu en brèche depuis la nuit des temps. Ce même dicton, dès lors, nous nous proposons de l'inverser pour étudier Le Temps de l'innocence, vaste fresque de la société new-yorkaise du dernier XIX e siècle où la musique n'est à première vueet à première oreille -qu'un domaine secondaire. Néanmoins, il apparaît rapidement que la terre d'élection de Schubert se révèle déterminante et met au jour les dangereuses liaisons tissées par chaque individu dans sa communauté. [diapo 4] La musique classique structure et suture d'abord une trame romanesque à considérer comme anthologie de morceaux très bien choisis au gré desquels les personnages évoluent. Par la suite, selon un processus de réduction, le quatrième art devient celui d'une bourgeoisie rythmée par les horloges, les sonneries, les petits bruits agaçants qui abolissent toute perspective d'élévation. Enfin, un tel resserrement atteint son apogée dans les vaines
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