Bien que repéré dès 1950, le site de Porz ar Puñs est un temps oublié puis redécouvert lors des tempêtes hivernales de 2013-2014 qui mettent au jour un important niveau coquillier. En 2021, trois tranchées ont été ouvertes dans la dune perpendiculairement au trait de côte afin d’appréhender en coupe la stratigraphie générale du site. Cette première campagne de fouilles a permis de mettre au jour plusieurs niveaux d’occupations humaines associés à des rejets culinaires plus ou moins denses selon les périodes et interstratifiés dans la dune. Si, dès 2021, la succession des couches était comprise dans ces grandes lignes malgré quelques mélanges dus à l’activité des lapins en particulier en bord de dune, il restait à comprendre dans le détail la nature de ces couches, leur période de mise en place et leur datation fine. C’est pourquoi, en 2022, nous avons agrandi la tranchée 1 de manière à disposer d’une fenêtre assez large pour permettre d’observer spatialement d’éventuels aménagements. La fouille de la tranchée 1 s’est poursuivie en 2023 et a atteint presque partout l’amas coquillier le plus ancien, l’USX3. Dans les niveaux supérieurs, ce sont des vestiges de la période contemporaine et de la fin du Moyen Âge qui ont pu être documentés. Sous l’épaisse couche de sable blanc quasistérile (US H4), les niveaux attribuables au Bronze ancien (US X0 et X1) ont presque intégralement été fouillés en 2023. Dans l’US X1, la découverte de structures empierrées ou en creux (murets, dallage, trous de poteau, fossé) laisse penser que le site ne correspond pas à un simple lieu de dépotoir mais que des structures domestiques y ont également été édifiées. De même, la reconnaissance de sillons d’araires entamant l’USX1 et l’USX3 indiquent une mise en culture du secteur dès le début de l’occupation Bronze ancien et à la fin de cette dernière. Dès lors, il faut envisager des utilisations différentes (agriculture versus habitat ou complémentaires (habitats et dépotoir, agriculture sur dépotoir) de cette zone durant le Bronze ancien. La mise en culture dans le sable étant rendu possible par la présence de riches couches organiques ou compost (les amas coquilliers), une rotation des occupations selon leur nature a dû avoir lieu sur une période relativement courte, circa 2150-1750 cal. BC. La couche de sable blanc qui correspond à l’USX2 a dû se mettre en place rapidement au début du Bronze ancien lors d’une phase d’acrétion de la dune, dès la fin IIIe millénaire. Sa fouille a livré une unique structure, petit empierrement formant un angle possible que nous avions interprété comme une occupation temporaire. Les coquilles de patelles qui se trouvaient en partie interne ont fait l’objet d’une étude scléronologique qui a démontré que ces coquillages ont été consommés à la fin de l’hiver (Oliveira et al., en prép.) ; ce sont donc bien les traces d’un petit campement saisonnier qui ont été mises en évidence. Parallèlement aux fouilles, les travaux en géoarchéologie donnent un éclairage plus large sur l’histoire humaine et paléoenvironnementale (dynamique de mise en place des dunes) du centre de l’île. S’il reste encore bien des points à éclaircir, la chrono-stratigraphie du site dans sa globalité est de mieux en mieux cernée. La micro-morphologie vient questionner la nature même des occupations. Ainsi, la couche coquillière à la base de la dune (US X3) s’est formée dans un environnement ouvert, mais nous ignorons encore si elle résulte d’un colluvionnement partiel, de déplacements naturel ou anthropique (rejet secondaire remobilisé) ? Quoiqu’il en soit, l’étude céramologique des US X0 à X3 montre une succession vraisemblable des occupations, depuis un niveau campaniforme auquel serait associé des tessons décorés de style Conguel jusqu’à un Bronze ancien assez évolué en passant par l’Épicampaniforme. L’étude des niveaux les plus anciens de Porz ar Puñs est donc une occasion unique en Bretagne pour comprendre les sociétés des IIIe et IIe millénaires avant notre ère.