Résumé: La reterritorialisation de l’alimentation est un sujet complexe, mobilisant à la fois les consommateurs, les acteurs économiques et les pouvoirs publics. L’angle d’attaque abordé ici est celui de la création de filières au sein d’un territoire, autrement dit viser l’objectif que l’ensemble des acteurs intervenant à la fabrication d’un aliment soient situés sur le même territoire que le consommateur final. Le projet applique ce sujet au territoire du Pays de Lorient et aborde ce défi en différentes étapes : il s’appuie sur une étude d’une initiative réussie, celle du Lait du Pays de Lorient, puis sur des enquêtes de terrain menées auprès des producteurs agricoles et des acteurs de la logistique (transformateur, transporteur, distributeur). En tout, une cinquantaine d’entretiens semi-directifs et 2 enquêtes auprès de 78 agriculteurs et 69 acteurs de la logistique ont été menés. Ils permettent de cerner différentes actions possibles de la part des pouvoirs publics pour booster la création de filières locales : la mise en relation des acteurs économiques du territoire, le soutien des collectivités via l’achat en cantine scolaire, la création d’une marque permettant d’identifier les produits locaux par les acheteurs et rendre concret l’initiative. Les résultats montrent aussi la nécessité d’une volonté émanant des acteurs de terrain, agriculteurs en premier lieu, mais aussi transformateurs ou coopératives. La prise en charge de la distribution locale par ces maillons industriels ”décharge” en effet les agriculteurs des taches associées à la distribution en circuit courts (transport, stockage, vente, etc.). L’équilibre financier est également un enjeu majeur pour créer une filière alimentaire locale pérenne ; cela repose sur un supplément de prix raisonnable au bénéfice de l’agriculteur et accepté par les acheteurs, mais aussi sur une distribution qui ne soit pas à perte pour les autres acteurs économiques engagés. Seuls des volumes de production suffisamment importants, permettant une massification de la distribution, pourront alors rendre cela possible et convaincre les intermédiaires, coopératives ou collecteurs, de s'engager dans ce type d’initiatives. Les résultats montrent enfin que le périmètre géographique pour parler de filières locales se doit d’être élastique et s’ajuster à l’implantation géographique des acteurs industriels, parfois en bordure du territoire étudié. L’échelon de la Bretagne apparait alors souvent comme le plus en phase avec les pratiques observées.