Archéologie de la mémoire, archéologie des droits humains. Quelle archéologie pour l’époque contemporaine ?
Résumé
Between July 1936 and April 1939, on the eve of the Second World War, Spain was the scene of a conflict between two ways of understanding and living in society, but only one of the two was victorious. The alzamiento, General Franco's insurrection against the legal democratic government of the Second Spanish Republic, established a regime with no political parties, no trade unions, no freedom of the press or assembly... in short, a dictatorship that has imposed its mark on the country and its people for forty years, and even to this day. In the various regions of Spain, from the first moments of the insurrection until 1 April 1939, as soon as Franco's troops, los nacionales, won a battle, they carried out shootings, imprisonments and mock trials that put an end to the lives of an unprecedented number of people, as well as to the hopes of the relatives of those who were imprisoned. After the end of the war, Franco's prisons continued to carry out executions, and the bodies were buried in mass graves or in ditches, along roadsides, behind an isolated wall that had served as an execution site, but the bodies were never returned to the families. For the families who had lost loved ones during the war, or even before, killed by anarchists, communists, in short, the ‘rojos’, the reaction was swift: the vast majority of the bodies were exhumed after the war and benefited from the duty of remembrance by obtaining a final burial. After victory in 1939, in all Spanish towns and villages, the dead of the nacionales were honoured by society with the display of their names
.
Entre juillet 1936 et avril 1939, à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, l'Espagne a été le théâtre d'un conflit entre deux manières de comprendre et de vivre en société, mais seulement l'une des deux a obtenu la victoire. Le alzamiento, l'insurrection du général Franco contre le gouvernement démocratique légal de la II e République espagnole, a instauré un régime sans partis politiques, sans syndicats, sans libertés de presse ou de réunion... bref, une dictature qui a imposé sa marque au pays et à ses habitants durant quarante années, et même jusqu'à aujourd'hui. Dans les diverses régions de l'Espagne, depuis les premiers moments de l'insurrection et jusqu'au 1er avril 1939, dès que les troupes de Franco, los nacionales, remportaient un combat, elles accomplirent des fusillades, des emprisonnements, des parodies de jugements qui mirent fin à la vie d'un nombre jamais précisé de personnes, ainsi qu'aux espoirs des proches de ceux qui entraient en prison. Après la fin de la guerre, les prisons du franquisme ont continué les exécutions, et les corps étaient enterrés dans des fosses communes ou dans des fossés, le long des chemins, derrière un mur isolé qui avait servi comme lieu d'exécution, mais les corps n'ont jamais été rendus aux familles. Pour les familles qui ont eu des morts pendant la guerre, ou même avant, tués par des anarchistes, des communistes, bref, les « rojos », la réaction ne se fit pas attendre : la grande majorité des corps furent exhumés après la guerre et bénéficièrent du devoir de mémoire en obtenant une inhumation définitive. Après la victoire en 1939, dans tous les villes et villages espagnols, les morts des nacionales, ont reçu l'hommage de la société avec l'affichage de leurs noms