Situé dans le Pacifique-Sud à l’Est de l’Australie, l’archipel de Nouvelle-Calédonie fait l’objet depuis la seconde moitié du 19ième siècle et en dépit des dénégations officielles, d’une occupation coloniale française. Les autochtones kanaks, qui ne constituent plus désormais que 45% de la population, en sont profondément traumatisés car, comme l’indiquent les indicateurs sociaux, les politiques d’assimilation de ces populations natives sont un échec. Dès lors, le dualisme de population, en relation avec le fait colonial originel, reste la question politique majeure de ce territoire. A la suite d’une grave crise ouverte en 1984 et sous la pression internationale des Nations-Unies, la France républicaine a mis en place un montage juridique et institutionnel compliqué pour décoloniser la Nouvelle-Calédonie selon sa propre culture politique. La coutume kanake est donc désormais intégrée au corpus juridique de l’État sous la forme d’un statut civil personnel . Cependant, au nom d’une citoyenneté univoque, la France refuse de considérer les Kanaks dans leur dimension collective et autochtone, telle qu’elle est notamment instituée dans la déclaration des Nations Unis de 2007 sur les droits des peuples autochtones. Dans ces conditions, sont niés leur identité communautaire, leurs droits spécifiques de premiers occupants et leur statut de victimes de la colonisation. Ainsi, la laïcité républicaine et l’égalité citoyenne s’appliquent insidieusement, non ici et à proprement parler à une religion, mais au mode de vie et à l’identité collective des victimes de la colonisation. Cette posture négationniste alimente et amplifie la crise identitaire et sociale ainsi que la perte des valeurs civilisationnelles de ce petit peuple d’Océanie confronté par ailleurs aux bouleversements de la mondialisation. L’histoire de la Nouvelle-Calédonie et sa situation sociodémographique permettent de contextualiser et d’éclairer la situation postcoloniale des Kanaks. Alors qu’elle est assise sur les Lumières, la tradition politico-juridique française permet de cerner la démarche ethnocide inconsciente de cet État colonisateur (I). Enfin selon notre analyse, les institutions autonomistes établies en 1999 et le processus d’autodétermination externe engagés aujourd’hui ne garantissent ni les droits autochtones des Kanaks ni la préservation de leur identité comme le démontre la contestation de la légitimité des autorités coutumières kanakes (II).