Avant l’utilisation de la poudre (début XVIIe siècle), l’extraction des minerais en roche dure nécessitait le recours à l’abattage par le feu. Cette technique nécessitait des quantités importantes de bois, en particulier pour l’exploitation des gisements de grande envergure. Cette activité a très probablement fortement impacté les écosystèmes forestiers environnant les mines, en modifiant leurs compositions, leurs structures et leurs dynamiques. Pour caractériser avec précision l’impact environnemental de la mine, il est d’abord indispensable de préciser sa chronologie et son intensité, puis de retrouver les potentielles stratégies de gestion et de pérennisation de la ressource en bois. Les datations radiocarbones ne sont pas suffisamment précises ni pour délimiter le début et la fin de l’exploitation ni pour détecter des éventuelles périodes d’arrêt et de reprises. D’autre part, l’étude des restes ligneux demande la construction de nouveaux référentiels dendrochronologiques destinés à l'anthracologie pour caractériser le bois utilisé et ainsi préciser les modalités de gestion de la ressource. Pour dépasser ces limites méthodologiques, nous avons étudié la mine médiévale de plomb argentifère de Vallauria, située entre 1465 et 1570 m d’alt. dans les Alpes-Maritimes (Saint-Dalmas-de-Tende). Nous avons combiné l’analyse dendrochronologique des restes ligneux prélevés dans la mine pour affiner les chronologies radiocarbones et la construction de nouveaux référentiels dendrochronologiques pour le Sapin blanc et le Mélèze d’Europe à partir de prélèvements d’arbres vivants (38 troncs et 112 branches) réalisés sur six placettes dont la fertilité a été estimée par phytoécologie. Parmi les 800 échantillons archéologiques mesurés (vestiges des bûchers d’abattage), 46 ont été datés et cinq chronologies ont été constituées. Trois chronologies de mélèze couvrent les Xie et XIIe siècles et deux autres de sapin, le XIIIe et le début du XIVe siècle. Au total, 1572 charbons ont été analysés et 733 ont pu faire l’objet d’une approche dendro-anthracologique (i.e. reconstruction du diamètre et/ou différentiation du bois de branche et de tronc). Parmi ces charbons, 187 proviennent de branches et 110 de troncs. Les diamètres restitués par la dendro-anthracologie suggèrent une exploitation de bois de diamètres variables allant de moins de 1 cm à 19 cm pour les branches et de 3,7 cm à 105 cm pour les troncs. Ces résultats laissent supposer que les bois utilisés dans la mine provenaient d’arbres abattus et débités dans leur intégralité pour fournir du combustible minier. Les cernes manquants des bois de branches datés ont été estimés pour approcher l’année d’abattage et ainsi préciser les chronologies. Les datations dendrochronologiques des branches supposent donc que la phase principale de l’activité s’est déroulée entre les XIe et XIIe siècles. Les dates plus récentes coïncident avec des tentatives de reprises infructueuses. Ces résultats partiels encouragent la poursuite de la construction de référentiels dendrochronologiques pour les conifères sud-alpins dans l’objectif d’ évaluer l’âge maximal des branches en fonction de leur diamètre, mais aussi de l’âge et du diamètre (à hauteur de poitrine) de l’arbre d’où elles proviennent.