Dans son ouvrage Théorie des fantômes, Sébastien Rongier explique comment « pour apparaître, le fantôme doit se faire image, prendre une apparence pour inventer un corps d’absence de corps ». Nous nous intéressons ici à une forme très particulière de cette figuration de l’absence du corps : le creux. On trouve des exemples de ce type de représentation fantomatique dans le film Kaïro (Kiyoshi Kurosawa, 2001) et dans le générique des saisons 2 et 3 de la série The Leftovers (Damond Lindelof, Tom Perrota, 2014-2017). Dans les deux narrations ceux qui restent ne comprennent pas exactement ce qui est arrivé aux disparus, qui ne laissent pas derrière eux un cadavre à veiller. Les deux réponses plastiques se ressemblent : elles répondent à la représentation du corps absent par le trou dans l’image, car le corps laisse une place vide dans l'espace mais l'être absent génère un trou dans la réalité telle qu’elle est appréhendée par les autres corps, non pas seulement un espace vide mais un manque. Le corps n’est plus un volume mais le négatif matériel de sa présence.