La période coloniale réunionnaise (années 1880-1950) est marquée par la présence d’un gouvernement républicain centralisateur et paternaliste (Lucas, 2006). Celui-ci s’empare des questions éducatives pour imprimer chez la jeunesse de l’île une construction identitaire calquée sur la métropole. La période de l’entre-deux guerres présente cette particularité consistant à faire émerger une élite locale formée sur un modèle assimiliationiste. Tenter de reconstruire le quotidien des classes en situation coloniale souligne une volonté de décrire et de comprendre les modalités de construction d’une citoyenneté ultra-marine en testant l’hypothèse suivante : l’éducation à l’altérité en situation de dépendance coloniale est-elle possible? La démarche historienne vise ici à mettre en évidence les interstices entre les représentations institutionnelles et les pratiques quotidiennes des enseignants ; dans cette perspective, Perrenoud (1993) et Apple (2004) parlent de curriculum prescrit et réel. Le corpus soumis à l’étude repose sur le fonds des Archives Départementales de La Réunion : les devoirs d’élèves produits et évalués (classes d’école élémentaire du Lycée Leconte de Lisle ; 1927-45) sont traités du point de vue des contenus et des dynamiques d’enseignement/apprentissage engagées.