Épisode tragique d’une histoire partagée entre la France et l’Espagne, traumatisme silencieux inscrit au fer rouge dans les généalogies familiales, l’histoire de l’exode antifranquiste dans la région de Marseille est curieusement absente de la mémoire collective et de l’espace public régionaux. Pendant la Seconde guerre mondiale, Marseille a pourtant été une plaque tournante de réfugiés en transit; la région provençale a vu s’établir de multiples camps d’internement et de travail forcé, et la cité phocéenne, située en zone libre, a été un haut lieu de la Résistance. Tandis que dans d’autres régions françaises, le Sud-Ouest notamment, la mémoire de l’exil espagnol a été l’objet de multiples travaux historiographiques comme d’actives politiques patrimoniales, elle demeure en Provence une histoire occultée. Pourquoi les traces de cet exil sont-elles reléguées à l’arrière-plan du patrimoine et de l’histoire locale ? Qu’est-il advenu du souvenir de ces réfugiés politiques, prisonniers et déplacés dont beaucoup ont fini par faire souche dans le Sud-Est de la France ? Comment mettre en lumière l’héritage de ces combattants, vaincus mais porteurs de la culture ouvrière et libertaire de l’Espagne républicaine ?