« Vivre en Harmonie avec la nature » , « Ramener la nature dans nos vies » , « Ne pas nuire » , « Ne laisser personne de côté » , les serments se multiplient à l’envi. Du « droit de détruire » au droit du vivant et aux droits de choses de la nature , un basculement axiologique fondateur de nouvelles visions écocentrées se profile-t-il ? Un nouvel ordre « oikonomique » se construit-il à la croisée de multiples courants de pensée et de représentations pluralistes des rapports Homme/nature progressivement reconnus par le droit ? Longtemps à l’ombre de toute traduction juridique et exposé à de vives disputes doctrinales, le mouvement des droits de la nature reçoit un écho renouvelé depuis la consécration des droits de la Terre-mère dans la Constitution équatorienne en 2008 . En écho à la journée internationale de la Terre nourricière associée au programme onusien « Vivre en harmonie avec la nature » , la multiplication de mobilisations citoyennes et associatives favorisent des processus de reconnaissance des droits de la nature et/ou d’entités naturelles dans plusieurs systèmes juridiques. L’Union européenne et ses États membres n’échappent pas à ces vagues de revendications promesses d’une révolution juridique susceptible de « sauver le monde » . Issue d’une initiative législative populaire , la récente loi espagnole 19/2022 du 30/9/2022 reconnait ainsi la personnalité juridique de la lagune de Mar Menor et de son bassin . Examinée par le Congrès des députés dans le cadre de la procédure d’urgence , cette loi illustre la détermination des promoteurs des droits de la nature d’interpeller le législateur sur l’insuffisance de mécanismes juridiques existants . L’ouverture des enceintes du Parlement européen (PE) et du Comité économique et social européen (CESE) à ces enjeux atteste de la progressive mise en visibilité politique des droits de la nature à l’échelle de l’UE. Elle démontre l’influence de structuration transnationale des mouvements associatifs sur les droits de la nature et le déploiement stratégique d’actions politiques et juridiques de défense de leur cause . La publication de l’étude « Towards an EU Charter of the Fundamental Rights of Nature” (2020) commanditée par le CESE et de celle sur “Can Nature get it Right ? Rights on Nature in the European Context » (2021) confiée à Jan DARPO par la Commission des affaires juridiques du PE traduit l’actualité des débats. La présente étude questionne la plus-value de la reconnaissance des droits de la nature à la lumière d’une analyse critique du droit de l’UE. Préalablement à l’identification des chemins susceptibles d’être empruntés ( II), il est essentiel de contextualiser les questionnements suscités par des droits de la nature sans perdre de vue la singularité du système juridique de l’UE ( I)