L’abattage des poissons d’élevage implique plusieurs étapes susceptibles de générer du stress et une activité musculaire qui affecte les qualités technologiques (pH, rigor) et organoleptiques (couleur, texture) des poissons ou de leurs filets. Nous avons voulu identifier l’impact des principales étapes qui précèdent la mise à mort de l’animal, depuis la pisciculture jusqu’à l’abattoir. Nous avons constitué 6 groupes de 10 truites triploïdes femelles abattues après chaque étape successive : un groupe témoin « non actif » (NA) péché rapidement dans le bassin d’élevage et anesthésié, un groupe « pêche » (P) constitué au milieu de la phase de chargement du camion à la pisciculture, un groupe « transport » (T) prélevé à l’arrivée du camion à l’abattoir, et trois groupes prélevés au cours de la phase d’abattage dans le bassin d’attente, un au début (D), un au milieu (M), et un à la fin (F) de l’abattage du lot qui a duré environ 2 heures. Pour ces trois derniers groupes, deux méthodes d’abattage ont été testées sur la moitié des poissons (n=5) : pêche à l’épuisette + matraquage derrière la tête + saignée (groupes D, M, F) ou pêche à la vis sans fin et machine à abattre (VM) (groupes DVM, MVM, FVM). Pour tous ces groupes, les caractéristiques des poissons (poids, morphométrie, adiposité), les qualités technologiques (rendements de découpe, pH musculaire), et organoleptiques (couleur et résistance mécanique des filets) ont été mesurées juste après l’abattage (entre 1h30 et 3h post-mortem selon les mesures). Des mesures du pH musculaire, de la couleur et de la résistance mécanique des filets ont été également été faites à 48h post-mortem (pm). Le poids, le coefficient de condition K (=poids/longueur3), le rendement en carcasse et l’adiposité (évaluée par le Fat-meter®) étaient similaires entres tous les groupes constitués. Le pH musculaire, mesuré juste après l’abattage, qui signe l’activité musculaire des poissons, a été impacté par les différentes étapes, avec des valeurs significativement plus faibles après le transport (T) et à la fin de l’abattage (F) par rapport au témoin (NA). Le pH musculaire mesuré à 48h pm n’était pas significativement différent entre les groupes. La couleur mesurée à l’abattage n’était pas différente entre les groupes ; à 48h pm les filets des poissons prélevés après le transport (T) sont apparus plus colorés (composantes rouge a* et jaune b* >). La résistance mécanique des filets, mesurée à l’abattage et à 48h pm, a également été impactée avec des valeurs plus faibles après le transport (T), et pour certains paramètres à la fin de période d’abattage (F). La méthode d’abattage (matraque-saignée vs machine à abattre) a eu peu d’impact sur les paramètres mesurés. Seul le pH des filets, mesurés à 48h pm, avait des valeurs un peu plus faibles pour les truites abattues avec la machine (VM). Les étapes de pêche et surtout de transport, pendant lesquelles les poissons sont très actifs, affectent donc le pH et la résistance mécanique des filets de truite. La phase d’attente avant l’abattage, au cours de laquelle l’activité de nage est plus faible, semble permettre une certaine récupération après le transport, mais une dégradation de certaines caractéristiques est observée à la fin de cette période d’attente, ce qui peut être dû à la durée d’attente elle-même ou à une activité musculaire plus importante des poissons qui sont contraints d’aller dans le système de pêche.