La vallée de la Romanche subit actuellement de profondes mutations liées au démantèlement d’installations hydroélectriques ayant forgé son identité. Alors que ce projet s’accompagne d’une valorisation de l’histoire industrielle de la rivière et de tentatives de patrimonialisation de certains bâtiments emblématiques, la recherche-création Les Ondes de l’Eau : Mémoires des lieux dans la vallée de la Romanche s’intéresse aux effets de ces transformations sur les expériences sensibles et les pratiques habitantes. Plusieurs méthodes in situ ont été mobilisées : arpentage appareillé (enregistrements photographique, sonore, vidéo), itinéraires réalisés auprès d’habitants et de professionnels, recueil de récits lors de rencontres publiques. De ces enquêtes situées se dégage une histoire de la rivière et de ses usages plus complexe que le simple récit d’un torrent productif porté par l’imaginaire de la houille blanche. Comment, à l’issue du terrain, ressaisir ces données pour témoigner des rapports pluriels à la rivière et mettre en débat son devenir ? Quelle forme proposer pour articuler une représentation spatiale de la vallée à l’expression d’expériences sensibles situées (mouvantes, singulières, cumulatives, parfois contradictoires) ? Notre communication présentera la Carte des mémoires sensibles réalisée dans ce sens. En tentant de mettre en partage les rapports pluriels à la vallée, celle-ci a été conçue comme potentiel lieu d’élaboration d’une critique des transformations du territoire prenant appui sur les expériences sensibles et les attachements au(x) lieu(x). Nous reviendrons : - sur la fabrication de cet objet de 6m de long et notamment sur les différentes opérations de traduction nécessaires à sa réalisation : sélection des récits et redessin, considérations spatiales relevant d’une articulation des échelles et d’un passage d’un espace euclidien à un rapport topologique, exploration graphique des dimensions sensibles de l’expérience. - sur son activation lors de discussions publiques (et in fine son éternelle incomplétude puisque se transformant à chaque réception) et sur les lectures spatiales, temporelles, relationnelles et sensorielles de l’attachement au paysage qu’elle propose.