Transformations économiques et nouvelles identités spatiales : la vallée de Comino, Italie
Résumé
Au cours d'une recherche sur les flux migratoires reliant une région du centre de l'Italie à la banlieue parisienne, j'ai constaté l'émergence d'une échelle géographique d'appartenance, absente dans la tradition locale : la vallée de Comino. Je me suis alors interrogée sur sa diffusion pour vérifier si elle n'était pas l'expression des changements locaux, notamment économiques, dont sont porteuses les personnes restées au pays. Bien qu'encore en acte, l'appropriation de la définition de vallée de Comino de la part des habitants reflet une sorte d'élargissement de l'identité villageoise lié à la réorganisation de la place des lieux de travail. La création de ce niveau, absent jusqu'aux années soixante dans la perception des résidents, relève d'un changement économique important qui a redessiné le visage de ces terrains montagneux. La campagne n'est plus perçue comme un espace de travail mais comme un patrimoine écologique à la beauté naturelle. Cette vision esthétique casse le traditionnel rapport de la paysannerie locale avec la terre comme moyen de production. Restés au pays, travaillant aux alentours, ces habitants donnent à l'ancrage affecti qui accompagne le processus de tertiarisation qu'ils ont vécu. Leur passé est assumé, travaillé et distancié. Le processus de folklorisation est accompli par ceux qui, descendants des paysans et des bergers, désormais ne le sont plus et travaillent dans d'autres secteurs. La construction de la vocation touristique, sous-tendue par la transformation de cet ancrage économique local, filtre une redéfinition des appartenances locales qui a cassé la coïncidence entre les relations du travail et celles de la famille.