Cet article examine la réinvention gestuelle de la figure du zombie dans La Nuit des morts-vivants, et le détournement comique auquel elle a ouvert la voie. Il ne s'agira pas d'interroger les reprises directement parodiques du motif dans les films ultérieurs 1 , mais de chercher ce qui, dans ce film fondateur, a ouvert la voie à une évolution comique. Le genre du « film de zombie » s'est, après Romero, caractérisé par une modalité horrifico-comique, même dans les films qui n'étaient pas explicitement des parodies 2. Or la tendance du film de zombie à osciller entre l'horrifique et le comique dérive largement-c'est du moins l'hypothèse de ce texte-de l'invention par Romero d'une gestuelle inédite, et, plus largement, d'une représentation nouvelle du corps zombie. Les zombies de Romero se situent entre le hiératisme pudique des zombies antérieurs, et les déferlements gore qui caractériseront les zombies plus tardifs. L'étude de La Nuit des morts-vivants sous l'angle du déséquilibre entre plusieurs modalités, et en particulier comme ouvrant la possibilité d'une dérive comique du motif zombie, sera donc articulée à l'analyse du corps et de la gestuelle zombie réinventés par Romero. Cette interrogation débouchera sur une problématique plus large, la représentation de la difformité corporelle au cinéma. Notre hypothèse est en effet que le zombie fonctionne comme une couverture qui rend acceptables, parce qu'elles sont dissimulées sous le manteau du fantastique, des représentations du corps interdites ailleurs.