Travaillant sur l’après‑guerre d’un groupe de 227 gens de lettres accusés ou condamnés lors de la répression des faits de collaboration, la possibilité de suivre tous ces individus à la trace s’avérait déterminante. La systématicité de l’enregistrement au dépôt légal de la Bibliothèque nationale de France semblait en ce sens incarner une bonne entrée empirique. Pour exploiter de manière diachronique une telle bibliographie, le recours à l’analyse de séquences a été retenu. Alors que l’analyse de séquences est souvent utilisée pour classer des trajectoires professionnelles, cette communication propose de faire usage de cette approche pour étudier les carrières bibliographiques. Cette perspective permet de distinguer quatre classes de destins bibliographiques (les « exclus », les « déclassés », les « survivants » et les « maintenus »). En associant ces groupes à une prosopographie des personnes qui les composent, il apparait que, loin de se réduire aux seules conséquences matérielles et symboliques de l’épuration, le sort éditorial de ces individus est sans cesse travaillé par d’autres variables sociales.