En se réveillant, Marco ressent une petite gêne, une sorte de langueur. Vasouillard, il jette un œil par la fenêtre. Un léger vent fait onduler les haies qui protègent les bananiers et les tomarilhos. Dehors tout va bien, il fait doux, comme toujours. Sur l’horizon, l’océan dodeline au large. Nous sommes aux Açores, sur l’île de Flores. Il fait beau. En ce début de mois d’avril 2020, cela fait presque vingt jours que l’île est redevenue une « vraie » île. En raison des cas de Covid 19 sur la grande île de São Miguel, les relations aériennes se sont arrêtées entre les neufs îles de l’archipel. Maintenant, Marco est fatigué. Camille, sa femme, est revenue depuis quelques semaines de Barcelone où elle a enchaîné les séances musicales en studio d’enregistrement. Elle ne s’inquiète pas. Depuis son retour, il a pu souffler un peu, se reposer, mais là, il est las. Pour se rassurer, il téléphone au Centre de Santé pour prendre rendez-vous. Il n’y a pas d’urgence. On doit le rappeler. Il aura un rendez-vous la semaine prochaine. Il a sans doute une légère fièvre et tousse un peu pour se donner bonne conscience. Il n’est jamais malade. Le Centre rappelle. Il décrit les symptômes. Il peut venir de suite. Il est attendu. Marco, rassuré, part au volant, seul, pour 18 km de tournants. Vingt-cinq minutes plus tard, il est devant le petit hôpital construit par les Français. Et là, tout bascule. Un médecin et trois infirmières surgissent en tenues chirurgicales.