Après une présentation méthodologique des modalités d’étude des mondes du trad, cette proposition présentera quelques premières pistes d’analyse de la diversité des lieux invoqués, convoqués, investis et animés par ces pratiques dans un espace transrégional et transnational (Auvergne-Rhône-Alpes, Val d’Aoste). Plutôt que d’opposer la « géographie mythique » et aujourd’hui largement diffuse du trad, reposant sur une représentation idyllique des espaces ruraux comme territoires d’origine, de sens et de valeurs tendant au compartimentage régional des pratiques, à ses espaces actuellement très diversifiés de déploiement (centralité des pôles urbains, réappropriation des marqueurs de l’urbanité et des modes de consommation citadins, reconquête des espaces de marge et de relégation), il s’agira davantage de voir comment s’imbriquent, se rencontrent et s’hybrident les références spatiales pour appréhender leur potentiel territorialisant. Quelle géographie symbolique (hauts-lieux, espaces d’inspiration, de refuge) des mondes du trad se dessine et quel impact a-t-elle sur les représentations et les parcours concrets, individuels et collectifs de l’espace ? L’exemple des mondes du trad nous propose ainsi de nombreuses pistes de réflexion quant aux recompositions contemporaines des liens entre rural et urbain, entre espace vécu, perçu et rêvé, entre global et local, entre valorisation de ce qu’il y a de particulier à être « ici » et attraction pour l’ailleurs et sa proximité dans un monde en croissante interconnexion. En faisant vivre des images-types et en réaffirmant la valeur d’échelles intermédiaires d’appropriation de l’espace (notamment la région) sur un mode dynamique, les acteurs des mondes du trad jalonnent leur monde par autant d’expériences hybridées, au carrefour du culturel, de l’artistique, du patrimonial et du social pour négocier leurs ancrages tant individuels que collectifs aux lieux.