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Communication Dans Un Congrès Année : 2015

Evaluation des compétences linguistiques des sourds profonds : incidences de théories linguistiques différentes

Résumé

Depuis les années 60, les « problèmes linguistiques » des sourds profonds suscitent l’intérêt. Or, de cette période à nos jours, les théories linguistiques les plus utilisées ont changé : si la syntaxe générative reste bien ancrée en Amérique du Nord, les chercheurs européens ont développé les théories de l’énonciation puis se sont familiarisés avec la linguistique cognitive. Chaque approche théorique accorde un intérêt plus marqué à certains aspects du langage, tels que la syntaxe de la phrase, l’énonciateur et la sémantique, ou encore la dimension cognitive. Les analyses des productions langagières des sourds profonds ont été menées selon ces points de vue variables, avec des méthodologies parfois radicalement différentes qui ont pu conduire à des observations et à des préconisations différentes. Ainsi, un intérêt pour la syntaxe de la phrase isolée est assorti d’approches quantitatives et statistiques, les performances des entendants constituant la norme : cela conduit à des observations sur la variété lexicale, la longueur moyenne des phrases, les erreurs produites par les sourds (ex. Simmons 1962 ; Grewel 1963 ; Goda 1964). L’étude de l’acquisition des règles transformationnelles par les sourds fait apparaître les difficultés et le retard de ces derniers (ex. Russell et al. 1976). Les enfants porteurs d’implants cochléaires font l’objet de nouvelles études en Amérique du Nord (ex. Geers et al. 2003, 2011 ; Duchesne et al ; 2008, 2009), études quantitatives portant souvent sur une seule facette de la langue. Les approches énonciatives accordent un rôle important à la situation d’énonciation et à l’énonciateur. Les choix effectués par l’énonciateur sont en partie dictés par le contexte et entraînent des opérations qui affectent les différents éléments de l’énoncé (prédicat, déterminations temporelle, modale, aspectuelle, nominale). Une étude qui ne se ferait que sur un point particulier ou dans le cadre limitatif de la phrase isolée perdrait beaucoup du potentiel de ces approches. Les analyses ont donc une dimension qualitative qui fait apparaître la cohérence des opérations effectuées et le sens qui en découle. Ces approches appliquées aux productions des sourds montrent que bon nombre de phénomènes traités jusqu’alors comme des erreurs pourraient faire système, notamment un système d’économie là où la langue de référence est redondante (Dubuisson et al. 1991 ; Vincent-Durroux 1992, 2009). Enfin, la prise en compte du langage comme activité cognitive (Lakoff et al. 1999 ; Guignard 1992) constitue une base théorique solide pour s’interroger sur les effets de l’absence d’audition des premiers mois de vie sur les schémas cognitifs, notamment la représentation de l’espace et du temps (Vinter 2000). L’existence de représentations spatio-temporelles spécifiques aux sourds expliquerait la présence de phénomènes communs aux langues signées et aux productions orales en différentes langues (Vincent-Durroux 2014). Une conséquence majeure (mais difficile à mettre en œuvre) pour les thérapeutes des jeunes sourds profonds oralistes serait alors de devoir agir sur les représentations cognitives.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01986246 , version 1 (18-01-2019)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01986246 , version 1

Citer

Laurence Vincent-Durroux. Evaluation des compétences linguistiques des sourds profonds : incidences de théories linguistiques différentes. Cures de langage(s) : Quelles théories pour quelles pratiques ?, Dec 2015, Arras, France. ⟨hal-01986246⟩

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