Dans la lignée des chapitres précédents qui se sont tous penchés sur certains phénomènes didactiques, le présent chapitre aborde la question de la formation des futurs enseignants en ligne et examine comment des compétences en lien avec l'image projetée en ligne peuvent se développer par le biais de l'autoconfrontation. En effet, un des enjeux de la formation à la pédagogie en ligne incite à réfléchir au rôle des ressources sémiotiques multimodales, telles que les gestes, le regard et les expressions faciales dans la construction du sens lors d'une interaction pédagogique médiatisée. Quel que soit son degré d'expérience pédagogique, l'enseignant en ligne est conduit à développer sa compétence sémiopédagogique, c'est-à-dire l'utilisation appropriée de ressources sémiotiques pour favoriser l'apprentissage et pour mieux gérer son enseignement (Develotte, Guichon et Vincent, 2010). Cela suppose d'aiguiser sa conscience sémiotique critique pour être en mesure d'exploiter au mieux les ressources sémiotiques, afin d'optimiser le potentiel d'apprentissage et maintenir l'attention de ses apprenants (Ricci Bitti et Garotti, 2011). Selon Guichon et Wigham (2016), cette conscience comprend un élément sémiotique car l'enseignement consiste à produire un ensemble de signes verbaux et non-verbaux. Elle doit être critique puisque l'enseignant doit développer progressivement un niveau élevé de conscience concernant l'information communiquée à son apprenant, mais aussi pour évaluer l'image de soi qu'il lui envoie. Nous postulons que comprendre la contribution de la webcam à la construction du sens constitue une partie intégrale de la conscience sémiotique critique. L'enseignant doit apprendre à utiliser les affordances de la webcam dans la production d'indices non-verbaux qui jouent un rôle central dans la compréhension réciproque et dans la personnalisation des relations entre interactants (Guichon et Wigham, 2016). Dans ce chapitre, nous nous intéressons à une affordance de la webcam, le cadrage, c'est-à-dire comment l'enseignant se positionne devant la webcam et, par conséquent, quelles informations il rend visibles dans le cadre de la caméra. Parmi les affordances de la visioconférence (cf. Guichon, chapitre 1), nous avons choisi le cadrage car il constitue selon nous une affordance critique à exploiter pour pouvoir se rendre visible à son interlocuteur, se construire une présence en ligne et participer pleinement à l'interaction.