Minorité issue d'un schisme de l'Islam ismaélien et organisée en communauté dans le sud du Liban au XI e siècle, les druzes ont la particularité d'avoir développé une religion secrète, influencée à la fois par la mystique musulmane et la philosophie aristotélicienne. La notion de cycle qui organise la cosmogonie druze (cycle des prophéties et des manifestations divines) a trouvé une expression originale dans la conception de la réincarnation de l'âme de corps en corps. Tout à fait singulière en milieu musulman, cette croyance est tout de même encadrée par des déterminismes sociologiques forts (on se réincarne selon son genre et selon sa religion) qui garantissent la permanence de la communauté. Il s'agit, en fait, d'atteindre la perfection de l'âme au terme d'une multiplicité de vies vécues en tant que druze. La perfection visée est un état de dépassement total de son individualité (c'est-à-dire ses désirs, sa volonté, sa capacité d'agir dans le monde), seul à même de permettre l'anéantissement en Dieu. Ceux qui atteignent cet état sont les religieux parfaits et sortent du cycle des réincarnations. Jamais plus de quelques-uns par « époque », ils représentent l'idéal religieux qui permet à l'ensemble communautaire de se définir. Le corps comme un vêtement de l'âme qui doit disparaître. Proches en cela des conceptions musulmanes relatives au traitement des morts, les druzes investissent considérablement les pratiques rituelles précédant l'inhumation, mais ne se préoccupent absolument pas de la dépouille après l'enterrement.