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Article Dans Une Revue Revue des Sciences sociales Année : 2010

L’expérience de la maladie et la désappropriation du corps

Ali Recham
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 978358

Résumé

le dysfonctionnement chronique du rein pose le problème du sentiment de propriété. Quand la frontière s'efface ou se déplace entre le dedans et le dehors, le familier et l'étranger, le soi et le non-soi, l'identité et l'altérité, l'homme malade sent-il son corps, l'organe atteint, le greffon lui appartenir ? J' en suis de plus en plus convaincue, que la frontière entre la vie et la mort, ou entre cette vie et d' autres vies possibles, n' est peut-être pas aussi étanche ou immuable que nous le croyons généralement (Sylvia 1998, p. 147). Un organe défectueux, nocif pour les autres organes et qui menace dangereusement ma vie, jusqu'à quel point est-il le mien ? s'interroge J.-L. Nancy philosophe et transplanté cardiaque. C'est à la même situation que se trouve confronté le greffé rénal. Comment peut-il encore considé-rer ses reins défaillants comme les siens ? Un organe tant voulu, attendu, enfin reçu, qui habite actuellement son corps, attaché par un complexe appareillage aux autres parties de son corps, et qui assure désormais une fonction vitale que ses reins ne sont plus en mesure d'assumer, est-il perçu comme étranger ou approprié quand on ressent que « Toute frontière psy-chique paraissait abolie. Qu'est-ce qui était en moi, qu'est-ce qui était au dehors ? Je n'aurais pu le dire avec certitude » (Barrier 2000, p. 32) 1. Si le greffon était un simple objet (neutre), dépourvu de sceau personnel , définitivement acquis, et ne menaçait pas le corps du transplanté – ou si lui-même n'était pas menacé par un éventuel rejet –, la greffe aurait suscité moins de questions. Comment un transplanté peut-il considérer le greffon, à qui il a cédé une partie de son identité, comme sien ? Comment peut-il encore parler de ce qui lui appartient et de ce qui ne lui appartient pas, alors que le je est remis en cause par l'affaiblissement identitaire et traversé par l'identité du donneur ? L'expérience de la maladie grave révèle que la personne est atteinte dans le sentiment de propriété du corps bien avant la greffe. La sensation de désappropriation s'enracine dans 146
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Citer

Ali Recham. L’expérience de la maladie et la désappropriation du corps. Revue des Sciences sociales, 2010, La construction de l’oubli, 44, pp.146-153. ⟨hal-01287030⟩
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