Le traité de Lisbonne instaure un nouvel équilibre institutionnel qui, notamment dans les domaines de l'immigration et de l'asile, accroît les pouvoirs du Parlement européen et les compétences de la Cour de justice. Institutions qui pourraient s'affirmer en se référant au principe de solidarité, en se rapportant à des exigences juridiques. L'un à la faveur du dépôt d'amendements, l'autre à la faveur du rendu de ses arrêts. Toutefois, une prudence s'impose. Il serait bien hasardeux d'omettre que les dispositions du traité de Lisbonne permettent à l'approche intergouvernementale de s'imposer à l'ambition supranationale, quitte à prévenir l'avènement d'une réelle solidarité entre les Etats membres sur les questions, d'asile et d'immigration. Et il serait pour le moins aventureux de négliger que les objectifs du pacte européen pour l'immigration et l'asile laissent les priorités sécuritaires des Etats l'emporter sur le respect de droits fondamentaux des migrants, au dépens d'une expérience de solidarité avec les plus vulnérables. Les beaux principes affichés semblent dès lors s'effriter : le projet commun est mis à mal par les replis nationaux ; les droits de tous sont mis mal par les peurs de certains. La solidarité entre Etats, la solidarité entre individus paraissent donc au moins pour l'heure être sacrifiées sur l'autel du repli et de la fermeture, sous couvert d'une constante référence à des contraintes de réalité qui relèvent plus du discours que des faits.