Notre note de synthèse rend compte d’un projet de recherche privilégiant une entrée « activité » pour l’analyse des problématiques d’éducation, d’enseignement et de formation. Ce projet de recherche défend la pluridisciplinarité au sein des sciences de l’éducation et de la formation (Albero & Guérin, 2014) pour traiter des enjeux de santé dans le rapport au travail. Il s’inscrit dans un contexte où le travail prescrit des enseignants du secondaire et du supérieur ainsi que leur formation professionnelle initiale et continue se transforment au rythme de fréquentes réformes. De fait, les changements organisationnels du travail qui en découlent s’inscrivent dans une logique et des principes issus du monde de l’entreprise qui sont transposés à la fonction publique (Cau-Bareille, 2018) sans que le travail réel des professionnels soit pris en compte. Il s’en suit que la fonction psychologique du travail peut être altérée et le développement professionnel empêché. Parfois même, le rapport au travail devient une épreuve au sein d’environnements incapacitants. Ce projet de recherche mobilise des présupposés théoriques issus du paradigme des théories de l’activité (Engeström, 1999; Engeström & Miettinen, 1999 ; Léontiev, 1972/1981, 1984 ; Vygotski, 1927/1999, 1930/1985, 2003) et de la théorie des capabilités (Fernagu Oudet, 2012, 2016; Sen, 1993, 2003). Il repose également sur une conception développementale de la santé qui rend indissociables à la fois les capacités d’action du sujet et son pouvoir d’agir sur la réalité qui l’entoure. Nous définissons le pouvoir d’agir comme le choix d’être et de rester en santé dans son rapport au travail au sens de Spinoza (potentia - puissance à persévérer dans son être) en prenant des libertés avec le milieu. Ces libertés sont parfois conquises grâce à la normativité du sujet au sens de Canguilhem (1966) pour une vie au travail en souplesse et non en réaction. Enfin, ce projet de recherche s’appuie sur une démarche d’intervention-recherche dans la perspective de dépasser l’opposition entre la recherche visant « la vérité » et l’intervention orientée vers l’action et l’utilité sociale (Schwartz, 1997). Sa visée praxéologique est double. Tout d’abord, il s’agit de la conception d’une formation professionnelle initiale des enseignants qui les prépare au travail réel et qui rende possible l’accompagnement collectif à l’entrée dans le métier dans une visée de santé et de développement professionnel. Puis, il s’agit de l’accompagnement au changement organisationnel du travail collectif d’éducation et d’enseignement. Opéré dans le cadre d’un Laboratoire du Changement fondé sur le principe de l’agentivité transformative du sujet (Engeström & Sannino, 2013), il s’agit d’une conception renouvelée du rapport entre recherche et formation continue d’enseignants en poste au sein d’établissements apprenants.