A sociological analysis of the transformations of the modes of subjectification : splits in the resistance and construction of a grammar of assent in professions of social action
Une analyse sociologique des transformations des modes de subjectivation : éclatements de la résistance et construction d'une grammaire de l'assentiment dans les professions de l'action sociale
Résumé
Since the 2000s, social workers are facing reforms concerning the reinforcement of state control on users’ care and a transformation of the financing modes of medico-welfare institution. These reforms are defined by an empowerment of actors, the use of competition between the departments and establishments submitted to calls for proposals, a demand for practices performance, the appearance of incentive regulation as the soft law ( Conseil d’État, 2013), and most of all, the formation of new actors, that is to say the social entrepreneurs, and the new financial measures represented by the contracts with social impact ( Chiapello, 2017). These profound and successive changes of the social action which define a “new spirit of action” (Martucelli, 2000) sound as an “injunction of professionalism” (Boussard et al. 2010). The question was to know the social workers’ feelings towards reforms which have been questioning their practice. What do professionals compelled to apply these changes say? More precisely, have the technical administrative changes and their related obligations been confronted to any resistance, creating meanwhile a gap, or a discrepancy, between the obligation and its practical application? We wish to show that aggiornamento of social action has occurred by a progressive accommodation of the neo-liberal governmentality which put to work its objects, its interventions, the professionals’ qualifications, the users’ places, the policy goals, the temporality, etc. Far from considering this mutations as simple technical and managerial transformations in a continuous search for objectification, quality and efficiency , we hypothesize that they create a new perspective which transforms the social workers’ ways of saying, seeing, and acting. Finally, we consider these mutations as changes that bring forward a transformation of the professionals’ modes of subjectification, a concept that we borrow from Michel Foucault and which is linked to the transformation of the mode of subjectification of the social question.The aggiornamento falls within a deep reassessment of the republican political doctrine which has historically built the social action on the social debt, the assistance and empowerment of people to finally recreates itself according to a neoliberal interpretation looking for the people’s responsibility, their integration and collective habits of social development. The mutations are thus analyzed thanks to a transition from a “logic of relationship” to a “ logic of service”. Faced with the explosion of the resistance, a grammar of assent first springs out as a sign of transformation of the professionals’ mode of subjectification.
Les professionnels de l’action sociale sont confrontés depuis les années 2000 à des réformes visant à renforcer le contrôle étatique sur la prise en charge des usagers et à une transformation des modes de financement des établissements sociaux et médico-sociaux. Elles se caractérisent par une responsabilisation des acteurs, une mise en concurrence des services et établissements soumis aux appels à projet, l’exigence d’une performance des pratiques, l'apparition de régulations incitatives dites soft law (Conseil d’État, 2013), et, point majeur, l’apparition de nouveaux acteurs, les entrepreneurs sociaux, et les nouveaux dispositifs financiers que sont les contrats à impact social (Chiapello, 2017). Ces profondes mutations successives de l'action sociale qui définissent un « nouvel esprit de l'action » (Martuccelli, 2010) sonnent comme une « injonction au professionnalisme » (Boussard et al., 2010). La question qui se posait à nous était de connaître la réception des professionnels du social face aux réformes qui sont venues interpeller leurs pratiques. Que disent de ces mutations les professionnels chargés de les appliquer ? Plus précisément, les mutations technico-administratives et leurs obligations afférentes ont-elles été confrontées à une quelconque résistance, créant ainsi un écart, ou un décalage, entre l'obligation et son application ? Nous souhaitons montrer que l’aggiornamento de l’action sociale s’est produit par un accommodement progressif de la gouvernementalité néo-libérale qui est venue mettre au travail ses objets, ses interventions, les qualifications des professionnels, la place des bénéficiaires, les objectifs d’action, la temporalité, etc. Loin de considérer ces mutations comme de simples transformation technico-gestionnaires par une recherche continue d'objectivation, de qualité et d'efficacité, nous formulons l’hypothèse qu’elles sont créatrices d’un autre regard qui transforme les manières de dire, de voir et d’agir des professionnels du social. Finalement, nous appréhendons ces mutations en considérant qu’elles mettent en avant une transformation des modes de subjectivation des professionnels, formule que nous empruntons à Michel Foucault, qui est en lien avec une transformation des modes de subjectivation de la question sociale. L'aggiornamento relève d'une remise en question profonde de la doctrine politique républicaine qui a construit historiquement l'action sociale sur les principes de la dette sociale, l'assistance et l'émancipation des publics pour finalement se reconstruire selon une interprétation néo-libérale qui recherche la responsabilité des individus, leur insertion et des pratiques collectives de développement social. Les mutations s’analysent ainsi par le passage d’une logique de la relation à une logique de service. Face à l'éclatement de la résistance c’est avant tout la constitution d’une grammaire de l’assentiment qui émerge pour témoigner d'une transformation des modes de subjectivation des professionnels.