Le changement institutionnel est le plus souvent abordé par le prisme des pressions extérieures ou des chocs. Cette recherche propose de déplacer la focale pour observer comment les acteurs institutionnels contribuent également à l’évolution des institutions. Pour rentrer dans cette boîte noire, nous mobilisons le courant de l’institutionnalisme organisationnel. En rassemblant les perspectives des logiques institutionnelles et du travail institutionnel, nous interrogeons de manière récursive la relation acteur-institution. Tout d’abord, nous questionnons la manière dont la complexité institutionnelle, inhérente à la présence de multiples logiques institutionnelles, affecte l’attention des individus. Ensuite, nous interrogeons comment les pratiques sont utilisées, par les acteurs, pour reconfigurer la complexité institutionnelle. Pour ce faire, nous menons une étude de cas unique au design enchâssé portant sur les directeurs pénitentiaires. Notre analyse met en lumière trois résultats. Premièrement, l’analyse individuelle révèle le poids de la complexité institutionnelle dans le cadre de la formation de l’attention des directeurs pénitentiaires. Deuxièmement, l’analyse des pratiques permet de découvrir trois stratégies portées par les directeurs pénitentiaires dans le cadre du travail institutionnel de maintien. Troisièmement, ils mettent en exergue une évolution endogène des logiques institutionnelles contribuant à caractériser le changement institutionnel de l’administration pénitentiaire sous la forme d’un alignement institutionnel. Ce faisant, ces travaux approfondissent nos connaissances sur la manière dont les acteurs institutionnels agissent pour adapter les institutions sociétales aux problèmes contemporains.