Migration bet and marital game. Impacts of departure on the matrimonial paths of sub-Saharan African women in France (Villeurbanne)
Pari migratoire et jeu conjugal. Incidences du départ sur les parcours matrimoniaux de femmes d’Afrique subsaharienne en France (Villeurbanne)
Résumé
Standing at the crossroads of the sociology of migration, family and gender, this thesis investigates the effects of the migratory experience on the marital paths of women who have left West and Central African countries as adults and settled in France for a long time. Beyond the question of gains/losses due to migration for these women, it aims to identify the forms and modalities of the (re)arrangements made within the private sphere, both in terms of the relationship to norms and of concrete practices. Adopting a life-course approach, the study is mainly based on biographical interviews and focus groups conducted with migrant women, in a fieldwork based in Villeurbanne.
This research reveals gender identities as a place that crystallises the issues and tensions induced by the migratory situation. Since the gender roles inherited from the societies of origin do not find the conditions for their reproduction in France, they are being re-examined. This calls into question the statuses of the partners – specifically by endangering male authority – in a migratory context that challenges the very definition of the couple, at a distance from kinship networks.
Beyond the diversity of marital and migratory situations on arrival in France, the survey points out that the migratory experience is as a strong element in the formation of matrimonial destinies, but it is not sufficient to account for their variations. Marital expectations are indeed shaped by parameters such as age, educational capital and social origin, (gendered) family socialisation or marital heritage - and not least, the disappointments that constitute it. However, by distancing women from their social and family environment as well as providing them with support of legitimation (institutional, normative, symbolic) for the exercise of individual marital choices, migration to France facilitates the expression and realisation of the latter, particularly in their more egalitarian aspirations.
In the end, the analysis shows how the migratory situation can be one of the resources available to individuals within the framework of the various power relationships across the marital space. It is more the preservation of autonomy than the quest for equality that appears to strongly guide the behaviour of migrant women, beyond the couple and beyond migration.
Située au croisement d’une sociologie des migrations, de la famille et du genre, cette thèse interroge les effets de l’expérience migratoire sur les parcours conjugaux de femmes parties adultes de pays d’Afrique de l’Ouest et centrale et durablement installées en France. Au-delà de la question des gains/pertes dus à la migration pour ces femmes, elle vise à identifier les formes et les modalités des (ré)agencements opérés au sein de la sphère privée, à la fois sur le plan du rapport aux normes et des pratiques concrètes. Adoptant le prisme du parcours de vie, l’étude repose principalement sur la conduite d’entretiens biographiques et d’entretiens collectifs menés auprès de femmes migrantes, dans le cadre d’un terrain d’enquête basé à Villeurbanne.
La recherche a fait apparaître les identités de genre comme un endroit qui cristallise les enjeux et les tensions induites par la situation migratoire. Ne trouvant pas les conditions de leur reproduction en France, les rôles de sexe hérités des sociétés d’origine se voient en effet réinterrogés, entraînant une remise en cause des statuts – en particulier via une mise en danger de l’autorité masculine – dans un contexte migratoire mettant à l’épreuve la définition même du couple, à distance des réseaux de parenté.
Au-delà de la diversité des situations conjugales et migratoires présentées à l’arrivée en France, l’enquête donne à voir l’expérience migratoire comme un élément fort dans la formation des destinées matrimoniales mais non suffisant pour en saisir les déclinaisons. Les attentes conjugales sont en effet modelées par des paramètres tels que l’âge, le capital scolaire et l’origine sociale, la socialisation familiale (genrée) ou l’héritage conjugal – et en particulier, les déceptions qui le constituent. Mais, en opérant une mise à distance de l’entourage social et familial puis en fournissant des supports de légitimation (institutionnels, normatifs, symboliques) à l’exercice de choix conjugaux individuels, la migration en France facilite l’expression et la concrétisation de ces derniers, notamment dans leur aspiration plus égalitaire.
L’analyse montre comment in fine la situation migratoire peut compter parmi les ressources à disposition des individus dans le cadre des différents rapports de force qui traversent l’espace conjugal. Et c’est moins la quête d’égalité que la préservation de l’autonomie qui apparaît fortement orienter les comportements des émigrantes, par-delà le couple et par-delà la migration.
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