Ce rapport présente la méthodologie et les principaux résultats des projets Santé-Mobilité et Santé-Mobilité en zones rurales, qui visent à mettre en lumière des aspects encore peu étudiés, les pratiques de mobilité et la place qu’elles occupent dans l’organisation du travail chez les soignants qui pratiquent la visite à domicile (VAD). Maillon essentiel de l’accès aux soins de personnes qui en ont fortement besoin (personnes âgées, personnes dépendantes, avec difficultés de déplacement ou ne disposant pas de moyens de transport), la visite à domicile, et les multiples déplacements induits a, par hypothèse, des implications fortes sur les journées de travail des soignants concernés. Cinq professions exerçant à leur propre compte (infirmier·e·s, masseurs-kinésithérapeutes, médecins généralistes, sages-femmes) ou au sein de structures privées ou associatives (aides-soignant·e·s) sont ainsi étudiées, dans différents territoires de la région Auvergne-Rhône-Alpes. L’approche, exploratoire et pluridisciplinaire, souhaite tirer parti d’apports et de méthodes développées en anthropologie, en aménagement, géographie et économie. Une méthodologie mixte qualitative – quantitative a été suivie pour le travail de terrain. Une part importante du travail empirique est consacrée à la collecte de données qualitatives, par le biais d’entretiens semi-directifs auprès de soignants des cinq professions. Ces entretiens ont été complétés, pour ces mêmes enquêtés, par des temps d’observation des soignants pendant les « tournées » de VAD qu’ils ont à faire pour prodiguer des soins au domicile des patients (suivant la méthode go-along ; Kusenbach, 2003). Deux terrains ont ainsi été menés à bien et analysés, le premier dans l’aire urbaine de Lyon, le second en zones rurales drômoise et ligérienne. Cette collecte qualitative cherche ainsi à aborder, dans une démarche compréhensive, les pratiques, les représentations, les ressentis et les « difficultés du métier », au plus près des conditions réelles d’exercice des soignants. La réalisation d’une enquête quantitative, par questionnaire web auprès des quatre professions exerçant en libéral dans la région Auvergne-Rhône-Alpes vient également nourrir l’analyse. Au total, 1524 questionnaires ont ainsi été complétés par les soignants de quatre professions – infirmier·e·s, kinésithérapeutes, médecins, sages-femmes – sur l'ensemble de la région AURA, permettant de compléter le terrain qualitatif pour chaque profession quant aux modes d’organisation, les pratiques professionnelles et les déplacements induits par la VAD, en fonction des caractéristiques de leur lieu d’exercice. Enfin, le projet a offert la possibilité de collecter des traces mobiles à l’aide d’une application dédiée, développée au LAET (MobAcess). Différents constats et analyses sont effectués, notamment quant à la mise en évidence des effets du territoire sur les conditions de déplacement et les conditions de travail au quotidien des différentes professions, les effets de la crise sanitaire sur l’activité, les difficultés rencontrées... Ces résultats permettent ainsi de documenter une question particulièrement importante dans des contextes d’inégalités croissantes d’accès aux soins et de vieillissement démographique, celle de l’investissement humain nécessaire pour apporter le soin au plus près des besoins des patients. Des pistes de réflexion pour l’action publique, pour surmonter les problèmes mis en évidence, peuvent ainsi être ébauchées à l’issue de cette recherche.