Notre analyse porte sur les 11 ans d’un corpus de chat de prévention du suicide (2005-2015), et plus particulièrement les récits extrémistes qui y sont tenus par les appelants : ces récits peuvent être a) contre l’appelant, produits par lui-même ou par d’autres, b) contre d’autres acteurs, par l’appelant ou par d’autres, et enfin c) contre l’écoutant et plus largement le dispositif d’écoute (par ex. devant la forte standardisation de certaines répliques des écoutants). Par ailleurs, les réponses de la part des écoutants, sériées selon la typologie présentée, nous permettront d’étudier les diverses réceptions et remédiations à cette violence verbale (tempérer les montées en tension ou les amplifier …) et ses conséquences souvent implicitées dans ce contexte interactionnel particulier. Nous proposons de réaliser une analyse outillée avec les logiciels TXM 0.8.3 et Lexico 5, et d’analyser, pour les deux types de locuteurs, leurs stratégies énonciatives, discursives et rhétoriques-argumentatives, dans l’expression de la violence verbale fulgurante (Fracchiolla et al., 2023) et les réponses qui y sont apportées. Nous attestons en effet souvent dans le corpus une « parole déchainée, dont l’objectif dépasse largement l’imposition d’un point de vue, et qui mise l’offense, la vexation, la menace, l’insulte, jusqu’à la dénigration et l’anéantissement de l’autre » (Giaufret, Rossi & Vicari, 2022), ou l’anéantissement de soi. Les interactions tenues sur cette interface étant généralement des discours de distance (Koch & Oesterreicher 2001), malgré les récits souvent très personnels et sensibles, les termes familiers et argotiques, les interjections, ou les usages de majuscules ou de ponctuations expressives caractéristiques des « nouveaux discours » propres aux médias sociaux, qui accompagnent cette expression de violence, sont d’autant plus remarquées. Une des difficultés de ces interactions par écran (Romain & Fracchiolla, 2016) résidant aussi dans l’absence de la prosodie, les préservations ou atteintes de la face (Goffman, 1967) et les discours accompagnants (excuses, explicitations d’adressage …), ou leur absence, permettront de prendre la mesure de la force de la violence convoquée.