Stephen Sondheim’s Follies: from the ruins of the musical to the rebirth of a genre?
Résumé
At the origins of Follies, a 1971 musical conceived by Stephen Sondheim (music and lyrics) and James Goldman (libretto), a photograph: that of actress Gloria Swanson, standing proudly like a showgirl among the ruins of the freshly demolished Roxy Theatre. Whether it is interpreted as a contemplation of theatre’s ruins, or a nostalgic evocation of a “golden age” of theatre, the sense of an ending dominates the story and structure of Follies. The play, which has no clear narrative or plot, is set during a party: Dimitri Weismann, former director of the Weismann Follies (an obvious allusion to the Ziegfeld Follies), has invited his former showgirls to meet in their former theatre, now abandoned and ready to be demolished. As Weismann himself puts it, the soirée becomes “a final chance to glamorize the old days, stumble through a song or two and lie about ourselves a little.” The musical partition, mostly made of pastiches, pays affectionate homage to songs from the 1920s and 1930s, and accompanies the delicate encounter between aging showgirls and their spectral younger selves, clad in their former show attires. Through these quaint yet spectacular vignettes (the production remains one of the costliest Broadway productions to this day), Follies seems to celebrate the very funeral of the musical and its early manifestations (among which the revue) and by extension, that of the very concept of entertainment.
However, Follies is not just a nostalgic look back at the golden age of Broadway entertainment. The play is highly innovative on many levels: the absence of a regular narrative definitely anchors the new “concept musical” as a more modern form than the old-fashioned “integrated musical”. Show-business glamour coexists with a gritty cynicism which pervades all characters in the play. Pastiche numbers rub shoulders with more minimalistic and modern motifs, typical of Sondheim’s musical signature. Therefore, how does Follies, by looking at the ruins of theatre’s days past, stage a “reversed” rebirth of the genre of the musical? Sondheim’s specific status in the musical’s redefinition process that occurred in the 1960s and 1970s also plays an important part in the rebirth of the genre: after the critical and popular success of Company in 1970, Sondheim became synonymous with the avant-garde of the musical, a movement more aware of the discrepancy between grim realities and the genre’s many utopias.
À l’origine de Follies, musical datant de 1971 et conçu par Stephen Sondheim (musique et paroles) et James Goldman (livret), une photographie : celle de l’actrice Gloria Swanson, vêtue d’une longue robe de soirée, posant à la manière d’une showgirl de revue en plein milieu des ruines du Roxy Theatre. Entre théâtre en ruines et évocation nostalgique d’un « âge d’or » de Broadway, c’est bien l’idée d’une fin qui préside à l’histoire et la structure de Follies. La pièce, qui ne présente pas de véritable fil narratif, se déroule lors d’une soirée qui réunit d’anciennes showgirls des Weismann Follies (clin d’œil à peine voilé aux Ziegfeld Follies des années 1920) dans leur ancien théâtre, qui est sur le point d’être démoli. Comme le dit leur ancien directeur, Dimitri Weismann, au début de la pièce, il s’agit d’un dernier salut au monde du spectacle, « a final chance to glamorize the old days, stumble through a song or two and lie about ourselves a little. » La partition musicale, constituée en grande partie de pastiches, constitue un hommage attendri aux airs de l’entre-deux-guerres, tandis que les corps vieillissants des showgirls valsent avec leurs jeunes fantômes vêtus de leurs tenues de spectacle. À travers ces vignettes musicales d’un autre temps, Follies semble presque devenir le tombeau spectaculaire (la production demeure à ce jour l’une des plus coûteuses de l’histoire de Broadway) de l’entertainment à l’américaine, dont le musical et ses proto-manifestations (parmi lesquelles la revue) sont l’avatar principal.
Pourtant, Follies ne se limite pas à un retour en arrière nostalgique, mais est une pièce innovante à plusieurs égards : l’absence de narration éloigne radicalement ce musical du modèle formel de la « comédie musicale intégrée », et entérine le sous-genre du concept musical. Elle fait coexister les paillettes du spectacle avec le cynisme et l’amertume qui gagnent les personnages. Les numéros pastiches jouxtent des motifs musicaux plus modernes, qui constituent la signature de Sondheim. Comment Follies, à travers la contemplation des ruines du genre, finit alors par incarner une forme de renaissance « à rebours » du musical ? La place qu’occupe Sondheim dans la redéfinition du musical américain qui s’effectue au cours des décennies 1960-1970 participe également de cette renaissance : après le succès de Company en 1970 (autre incarnation du concept musical), Sondheim devient l’un des meneurs d’une forme d’avant-garde du musical, davantage consciente du décalage entre la sombre réalité et les utopies que promeut le genre.