Cette étude analyse les parcours et les représentations des auteurs et victimes de violences conjugales, en mettant en lumière les divergences dans leurs perceptions. Basée sur 21 entretiens avec des auteurs masculins et 20 avec des victimes féminines en Haute-Saône, l’enquête révèle un décalage fondamental dans la compréhension des violences. Les auteurs, souvent identifiés par des condamnations judiciaires, réduisent leurs actes à des incidents isolés, justifiant parfois leur comportement par une supposée réciprocité dans les violences. Ils minimisent la portée des violences psychologiques, pourtant centrales dans les récits des victimes. Ces dernières décrivent un cycle continu de violences, mêlant agressions physiques, contrôle psychologique et isolement social, provoquant anxiété, dépression et dépendance envers leur agresseur. Le faible taux de dépôt de plainte par les victimes (25 %) reflète leur méfiance envers le système judiciaire, davantage orienté vers les violences physiques objectivables. Ce système peine à reconnaître les dynamiques insidieuses de domination, qui rendent les violences symboliques et psychologiques invisibles mais dévastatrices. Ce décalage dans les récits soulève un enjeu clé : la prise en charge effective des violences conjugales nécessite une approche globale intégrant toutes leurs formes, pour mieux briser le cycle et accompagner les victimes.