C’est à travers la production des images en milieu provincial que nous aborderons la thématique du colloque. Les reliefs figurés ou les sculptures découvertes en contextes ruraux proposent un panel de forme et d’iconographie qui révèlent l’existence durant toute l’Antiquité d’un art, qui a été qualifié tantôt d’art provincial, populaire, ordinaire ou plébéien selon les auteurs. Les interprétations portées sur ces reliefs à la typologie extrêmement variée permettront d’approcher la question de la diversité des modes de représentation à travers des séries de reliefs associés à des contextes funéraires ou sacrés. Pour tenter d’analyser cet espace de création en milieu provincial, il y a lieu de s’interroger tout d’abord sur le répertoire iconographique ainsi que sur les modèles dont sont issus les réalisations figurées. C’est de cette manière que ce corpus a le plus souvent été abordé. Les conclusions des études stylistiques proposent habituellement de distinguer des artisans ou des ateliers de premier plan liés à des commanditaires fortunés, tandis que les réalisations moins soignées seraient associées à un contexte socio-économique et culturel moins riche, voire moins romanisé. Cette interprétation un peu trop rigide et systématique a été discutée par de nombreux auteurs. Ainsi, les travaux de T. Hölscher qui ont porté sur les spécificités de l’art italique invitent à écarter cette lecture exclusivement sociale d’une différentiation stylistique au profit d’une interprétation syntaxique, liée à des choix de représentation en fonction des registres iconographiques, autrement dit en fonction des scènes qui sont à représenter. Loin de permettre de résumer à elle seule l’éclectisme des réalisations disponibles en contexte provincial, cette interprétation souligne la fonction utilitaire de l’art romain présent aussi sur les réalisations disponibles dans les Gaules et les Germanies. Dans une démarche originale, on tentera d’y associer les questions de techniques, de savoir-faire, ainsi que les matériaux mis en œuvre, qui permettent de dépasser les seuls critères esthétiques. Plusieurs dossiers seront abordés pour fonder cette réflexion. Les reliefs et sculptures taillés dans des matériaux locaux dont certains sont considérés comme des pierres d’œuvre a priori moins appropriées à la sculpture seront envisagés, comme le grès, le granit, etc. Des dossiers déjà publiés ou inédits, comme celui des reliefs de Sistrières (Montchamp, Cantal), viendront illustrer le propos. À travers ces différentes observations, l’objectif est d’élargir le prisme des réflexions sur les choix qui président à ces représentations figurées et ainsi de mieux appréhender l’originalité d’une expression provinciale de la romanité.