A partir d’une recherche en cours sur la lecture des textes littéraires en lien avec l’Ifé (Bishop, Belhadjin), il s’agira d’analyser comment les enseignants s’emparent des albums, lorsqu’ils sont confrontés en formation à un outil qui les questionne sur le ou les sens de l’œuvre. D’une part, l’album constitue une des formes des littératures qui intéressent le colloque, puisqu’il a été souvent utilisé en classe comme un support à des activités interdisciplinaires autour d’une pédagogie du thème (cycle 1) : il joue alors le rôle d’outil pédagogique et non celui d’objet à étudier, le privant de son statut d’œuvre à comprendre et à interpréter et donc d’objet à enseigner pour lui-même. Pourtant, la lecture de l’album induit une réception propre à la spécificité du rapport texte-image (Van der Linden, 2007). L’album engage ainsi le même degré d’investissement de l’élève dans la lecture que tout autre texte littéraire, en se fondant sur des procédures de haut niveau notamment pour lever les implicites (Dispy, 2011), inhérents au discours littéraire. D’autre part, la question de la formation à l’enseignement de ces ouvrages est cruciale pour conduire à une lecture outillée des enseignants afin de ne pas instrumentaliser l’album, mais bien de lui octroyer pleinement son statut littéraire, avec la complexité que cela implique. L’usage des albums en classe est maintenant bien documenté (entre autres, Leclaire-Halté et Spécogna, 2015 ; Turgeon, Tremblay et De Croix, 2019), mais la lecture préparatoire à l’élaboration du dispositif didactique demeure un temps relativement invisible ou laissé à la discrétion de l’enseignant. En effet, depuis 2002, date d’une certaine légitimation de la littérature de jeunesse à l’école par son entrée dans les textes officiels, la formation à la littérature de jeunesse, et par là à la lecture de l’album, ne cesse de se reconfigurer entre la formation continue et la formation initiale, elle-même maintes fois réformée depuis 2008. Dans le cadre de l’utilisation d’un outil didactique en formation (Bishop, Belhadjin, à paraître), on étudiera la manière dont les enseignants élaborent à la fois leur lecture personnelle et leur séquence d’enseignement, notamment en ajoutant d’autres méthodes d’investigation des ouvrages qu’ils mobilisent par ailleurs (visibiléo, narramus par exemple). La communication s’appuiera sur un corpus de dispositifs d’enseignement-apprentissage élaborés par des enseignants, expérimentés ou novices, recueillis au cours de formations dans diverses académies, à partir des albums suivants : Supercagoule d’Antonin Louchard pour le cycle 1, Une soupe au caillou d’Anaïs Vaugelade et Mon jour de chance de Keiko Kasza pour les cycles 2 et 3. La comparaison des exploitations envisagées en classe pour un même album interroge l’appropriation de l’outil proposé en formation et les interactions entre le déjà-là des enseignants et les objectifs de la formation dispensée. On observera notamment les déplacements des enseignants dans leur lecture professionnelle des albums grâce aux modalités déployées en formation autour de l’outil expérimenté.