Un parcours de vie est voué à être jalonné d’évolutions, de changements et de ruptures. Tous ces éléments perturbateurs amènent l’individu à changer ses habitudes, de manière plus ou moins contrainte. Ainsi, l’arrivée d’un enfant, la perte d’un emploi, le passage à la retraite, un divorce, sont autant de ruptures que de possibilités de changements dans le mode de vie. La mobilité quotidienne en est un aspect qui ne fait pas exception. Or, à l’heure des réflexions sur la transition écologique, la question des déplacements au quotidien se révèle sensible. Face aux nécessaires changements de pratiques, se dressent des mobilités contraintes par le mode, par la distance ou même par les motifs de déplacement. Pour éclairer la part de contrainte et de choix dans leurs déplacements, j’ai choisi de mettre en regard des ménages aux biographies qui possèdent des points communs. Je propose donc de comparer les habitudes de déplacements de familles biparentales, de familles monoparentales, de personnes actives et de personnes retraitées. Ces profils de ménages apportent un éclairage unique sur différentes phases possibles d’un cycle de vie. Cette approche mène à plusieurs questionnements, qui dépassent la seule question des mobilités quotidiennes : - Dans quelle mesure un même événement clé peut aboutir à plusieurs trajectoires de vie et habitudes de déplacement ? - Quelles priorités sont données et à quels moments de la vie ? Est-ce qu’une personne active vivant seule priorisera plus la proximité au travail qu’une famille ? Est-ce qu’une famille monoparentale devra plus s’éloigner du lieu de travail pour accéder à un logement accessible et au confort suffisant pour se reconstruire ? L’approche par les quatre profils évoqués permet de mettre en parallèle les changements de pratique de déplacements avec les changements de trajectoires familiales. La comparaison de ménages de cinq municipalités permet d’éclairer les disparités d’habitudes avec une localisation résidentielle commune. Ainsi on retrouve des ménages, à différentes phases de leur vie, qui habitent au même endroit. Et ce lieu de départ, commun à la trajectoire de vie mais aussi aux déplacements du quotidien, facilite la comparaison et la compréhension de l’impact des biographies respectives sur les habitudes de mobilité. A cette première approche se couple une seconde, plus territoriale. En effet, l’impact de la localisation (Calvet et al., 2010 ; Brisepierre, 2012,) peut être mis en lumière à travers la comparaison de ménages au même point de leur trajectoire de vie. Cette double approche permet d’étudier les facteurs liés aux éléments biographiques mais aussi aux éléments spatiaux. Cette proposition résulte de l’analyse d’une vingtaine d’entretiens qualitatifs auprès de ménages résidant dans la périphérie de Clermont-Ferrand. Ces ménages répondent à des critères d’échantillonnage précis en termes de composition, professions et catégories socioprofessionnelles etc. Ces entretiens ont pour but de calculer leur coût résidentiel (Maresca, 2012). Ces entretiens sont aussi l’occasion d’éclairer les disparités de pratiques au sein des profils. Par exemple, on peut analyser l’impact de la présence de deux individus adultes sur les mobilités avec des enfants dans le cas des familles (Tabbone, 2017) ou de voir en quoi la perte du motif de déplacement lié au travail peut provoquer des changements d’habitudes chez un individu retraité. Il s’agit d’identifier des facteurs événementiels de trajectoire de vie expliquant les pratiques de mobilités. L’originalité de la méthode réside dans le guide d’entretien qui permet la prise en compte de tout l’écosystème de vie du ménage. Ainsi, la question de la mobilité quotidienne est abordée à travers les trajectoires de vie, la localisation résidentielle et le choix de logement. Cela correspond aux éléments qualitatifs qui composent le coût résidentiel. Cette pluralité d’éléments de contexte permet d’enrichir le regard sur la mobilité quotidienne par un prisme social et territorial. Pour comprendre les habitudes de déplacement des différents profils de ménages, il s’agit de comprendre leurs choix liés à la localisation de leur lieu de vie, élément majeur des mobilités et origine de nombreux déplacements. Or mon approche par les trajectoires de vie permet d’éclairer le degré d’attachement au lieu de résidence ou de contrainte de ce dernier. Ainsi, en comparant des biographies ayant des points communs, il est plus aisé d’identifier quels éléments de contexte amènent les ménages à effectuer ces déplacements quotidiens, témoins de la singularité des profils.