Optimiser son alimentation en ultra-trail. Circulation et concurrence entre savoirs scientifiques et savoirs expérientiels
Résumé
Ultra-trail running, a relatively growing niche sport, is a particularly intense, energy-intensive endurance event. Food is an essential factor in producing performance and maintaining integrity, even for “ordinary” runners in search of self-improvement. Based on a socio-ethnography of “ultra” food systems begun in 2019 (observation, 30 interviews, documentary and netnographic analysis), we will describe what knowledge is mobilized by (and around) ultra-trailers to maximize nutrition in extreme conditions. We'll be looking at how scientific nutritionist knowledge and experiential knowledge relate to each other or clash. The uncertainty of the first challenges will highlight a heightened sensitivity to the techno-scientific promises of experts (researchers, coaches, manufacturers), mobilizing sometimes divergent institutionalized nutritionist knowledge. As the “ultra” eater's career progresses, we'll show that experiential knowledge, derived from practice and sometimes nourished by social networks, grows in power around a sensitive and hedonic rationalization of knowledge and behaviors. Between the standardized ingestion of energy substrates and the more personalized assimilation of pleasure foods, “ultra” eaters combine rather than compete knowledge in the name of self-realization.
La course en ultra-trail, pratique sportive de niche en relative croissance, est une épreuve énergétique d’endurance particulièrement intense. L’alimentation y constitue un enjeu essentiel de production de performance et de maintien de son intégrité, même pour des coureurs « ordinaires » en quête d’optimisation de soi. À partir d’une socio-ethnographie des systèmes alimentaires « ultra » débutée en 2019 (observation, 30 entretiens, analyse documentaire et netnographique), nous décrirons quelles sont les connaissances mobilisées par les (et autour des) ultra-traileurs pour maximiser la nutrition en conditions extrêmes. Nous verrons comment s’y articulent ou s’y confrontent les savoirs nutritionnistes scientifiques et les savoirs expérientiels. L’incertitude des premiers défis soulignera une sensibilité plus marquée aux promesses technoscientifiques des experts (chercheurs, coachs, industriels) mobilisant des savoirs nutritionnistes institués parfois divergents. Avec l’avancée dans la carrière de mangeur « ultra », nous montrerons que les savoirs expérientiels, issus de la pratique et parfois nourris par les réseaux sociaux, montent en puissance autour d’une rationalisation sensible et hédonique des connaissances et des conduites. Entre ingestion standardisée de substrats énergétiques et assimilation plus personnalisée de nourriture-plaisir, les « ultra » combinent plus qu’ils ne mettent en concurrence les savoirs au nom de l’injonction à la réalisation de soi.
