Depuis 2015 et avec la succession de crises migratoires (syrienne, soudanaise, afghane, ukrainienne…), de nombreuses universités, en France (Bouffet et al., 2021) et en Europe (Degée, 2021), ont décidé de relever le défi de l’intégration des étudiants exilés dans les formations universitaires. Pour ce faire, des dispositifs variés ont été mis en place répondant à trois besoins : l’apprentissage de la langue française, l’acquisition d’une culture d’apprentissage universitaire adaptée pour garantir une réussite étudiante, l’accompagnement vers (et par la suite dans) les formations universitaires. C’est dans ce cadre que s’inscrit le dispositif mis en place par la Maison des Langues (ML) de Le Mans Université (LMU) : le DU Passerelle des étudiants en exil (DUP) depuis 2020. Organisé en semestre, ce dispositif amène un groupe d’étudiants à valider un niveau de langue tout en découvrant la méthodologie universitaire et en explorant son projet personnel. Dans cette communication, nous commencerons par présenter le travail de contextualisation (Salam, 2023) réalisé depuis 015 pour construire une offre de formation en indiquant les aménagements mis en place depuis 2022 avec l’arrivée des étudiants ukrainiens et les impacts de cette crise sur la formation deux ans plus tard. De manière générale, nous aborderons les questions de l’accessibilité de ce type de formation et des spécificités de la préparation à l'intégration à l'environnement universitaire. Nous nous intéresserons aussi aux choix pédagogiques et méthodes développées par l’équipe en charge du projet, amenant les bénéficiaires à s’affilier progressivement à un « métier d’étudiant » (Coulon, 2004). Ce sera aussi l’occasion de préciser comment ce type de projet solidaire et en urgence trouve sa place au sein d’une politique plus globale d’inclusion à l’œuvre aussi bien au niveau de l’université et de l’écosystème local. Enfin, nous nous pencherons sur l’efficacité du dispositif mis en place en nous intéressant à la façon dont il contribue effectivement à la réussite des apprenants, sans bien sûr négliger les difficultés identifiées. Nous questionnerons aussi la notion de « didactique de l’urgence » ou « de la catastrophe » en proposant des éclairages de la psychologie sociale comme l’approche centrée sur le développement du pouvoir d’agir des personnes et des collectivités (Picolet & Le Bossé, 2022). Pour répondre à cette problématique et comprendre à la fois le vécu des acteurs, nous avons réalisé des entretiens semi-directifs de type compréhensif (Kauffman, 2011) avec un panel intégrant à la fois des étudiants actuellement dans le dispositif, des étudiants ayant suivi le dispositif et ayant intégré l’université à la rentrée 2023 et d'anciens étudiants ayant suivi le DUP et un parcours universitaire, réussi ou pas, et actuellement sur le marché du travail en France. Nous croiserons ces résultats avec des entretiens réalisés avec les enseignants du dispositif. La diversité de profils et le croisement des données nous amèneront à construire un bilan critique du dispositif et de notre démarche en urgence, afin de proposer des recommandations méthodologiques pour pouvoir faire face aux crises à venir.