L’acte politique de la création des « fortifs » donne lieu à la naissance d’un espace, à la fois étanche et perméable, dont les usages détermineront pour longtemps les destins croisés de Paris et des banlieues, au-delà de sa vocation militaire. Voté en 1919, achevé en 1929, le démantèlement de l’enceinte laisse un gigantesque « vide », rapidement comblé de manière licite et illicite. La ceinture constitue le lieu de visions ambitieuses, hygiénistes, réformatrices, circulatoires. Elle est aussi la scène des relations ambivalentes que Paris noue avec les « banlieues », dont elle a peur des assauts et dont elle a besoin pour s’agrandir. La ceinture devient le réceptacle des besoins et des projets, formels et informels, des cimetières aux stades, des logements aux circulations. Le boulevard périphérique, achevé en 1973, en forme aujourd’hui une pièce centrale. Cette immense autoroute semble écraser le territoire auquel elle est pourtant subordonnée, ces rapports de force paradoxaux et dissymétriques nécessitant, pour comprendre les ressorts qui travaillent cet espace, que la ceinture puisse être aussi pensée hors du périf. Sous le périf, la ceinture : c’est l’objet de cet essai qui propose de saisir cet espace par la photographie qui l’a regardé, de 1919 à 1970. Dans le choix de ces bornes temporelles se lisent deux actes politiques forts, le déclassement de l’enceinte et la réalisation du périphérique, qui favorisent la réouverture comme le resserrement des possibles, marquant profondément le futur de la ceinture et de ses représentations.