Coopérations villes-montagnes : reterritorialisations en cours - Archive ouverte HAL
Communication Dans Un Congrès Année : 2022

Coopérations villes-montagnes : reterritorialisations en cours

Résumé

Cette communication se propose de traiter de la question des recompositions territoriales dans un cas particulier mais à plus d’un titre emblématique de ce qui a longtemps été appelé le « sillon alpin », de Grenoble, Chambéry et Annecy comme métropole et communautés d’agglomération, les vallées qui les traversent et les massifs qu’ils ont en commun. Il se trouve que les réformes intercommunales et les politiques d’aménagement de cette dernière décennie auraient pu inciter à ce que se constituent de vastes ensembles territoriaux capables d’englober villes et montagnes, basses et hautes vallées, amont et aval. L’ambition de cette coopération territoriale souhaitée se nourrissait du principe que ces logiques d’interdépendance étaient une ressource pour reterritorialiser les politiques publiques (Bussi, 2010). Logement et mixité sociale, tourisme et récréation, agriculture et forêt, protection des espaces naturels et qualité paysagère, optimisation des implantations économiques et préservation du foncier constructible, risques naturels et sociaux … il se trouve que les coopérations villes-montagnes concentrent une bonne partie des problèmes contemporains caractéristiques des transitions, de la gouvernance territoriale et de la recherche de nouvelles solidarités. La configuration spatiale de ces milieux contraints participe même à les exacerber. Il n’est donc peut-être pas très étonnant que ces trois grandes villes aient vu lors des dernières élections municipales des basculements majoritaires comportant la présence de mouvements citoyens associés à des écologistes. Ces élections ont manifesté des attentes de plus grande intégration des thèmes naturalistes dans le fait urbain et de plus grande préoccupation pour les enjeux de participation, concertation ou cogestion bref un élargissement socio-écologique. En ajoutant que les principaux massifs concernés sont des Parcs naturels régionaux (Vercors, Chartreuse et Bauges) porteurs de politiques publiques engagées dans la transformation par l’éducation, la participation citoyenne et l’écoresponsabilité, alors il aurait été possible d’en déduire l’existence d’un certain alignement des planètes permettant d’envisager cette transition territoriale. Quelques années après, les coopérations villes-montagnes ont-elles bénéficié de cette nouvelle configuration socio-politique ? Voit-on émerger des politiques plus globales, plus intégrées et plus biorégionalistes à l’échelle de ces nouveaux territoires d’interdépendance ? Cette enquête s’inscrit dans une perspective de sciences territoriales (Vanier, 2009 ; Beckouche, 2012 ; Lajarge, 2012 ; Magnaghi, 2014 ; Rollot, 2018) réclamant une lecture par les jeux d’acteurs et les reconfigurations des régimes d’engagement dans l’action (Werlen, 1993 ; Gumuchian, 2003 ; Thévenot, 2006). L’hypothèse défendue ici est que les conditions ne sont pas toutes réunies pour que cette reterritorialisation par intégration des pratiques, besoins et attentes citoyennes se traduisent par la modification des structures, organisations et institutions publiques existantes ; une coopération plus intégrée, engagée et engageante entre villes et montagnes réclamerait plus de « communs territoriaux » pour compenser les manques des politiques publiques. La présente communication s’appuie sur une enquête portant sur les réalisations, réussites et échecs des politiques publiques de coopération engagées par les collectivités locales concernées. Une série d’entretiens spécifiques (en cours) portant sur le bilan de ces premières années viendra conforter des travaux monographiques (en partie terminés) menés depuis plusieurs années sur chacun de ces territoires de villes et de montagnes (Bloch-Lajarge, 2015 ; Baron-Lajarge, 2016). Il sera proposé une comparaison des situations et une grille d’analyse des ressemblances et dissemblances. L’enjeu de cette enquête réside dans la capacité à proposer une généralisation sur trois registres : i) le rapport entre villes centres et intercommunalités (Métropole, CA, CC, SM) nécessitera une critique du dispositif issu de la loi MAPTAM et une discussion du rôle ambigu des arbitrages préfectoraux ; ii) les enjeux de planification territoriale entre micro et macro-échelles (PLUi, PCAET, PDU, Plan de PNR, SCoT) nécessitera une critique des règles d’intégration normative et une discussion du rôle devenu ambigu de la figure du « projet de territoire » ; iii) la place des collectifs citoyens dans la définition des politiques publiques (moins par référentiel ou instrument que par système de relations) nécessitera une critique des processus de spécification et de transversalité et une discussion du rôle ambigu de l’innovation territoriale. Au final, ce que nous chercherons à démontrer est qu’il existe déjà de nombreux signaux de la présence de « communs territoriaux » sur lesquels devraient pouvoir se construire de nouvelles coopérations plus intégrées et intégrantes. Celles-ci s’avèrent plus centrées sur la capacité à réinventer des manières d’habiter et de rendre habitable de manière interdépendante des territoires considérées comme étant de nature différente jusqu’à maintenant. Ces coopérations villes-montagne auront à dépasser les blocages issus d’une réforme territoriale imparfaite et incomplète, en attendant une hypothétique nouvelle étape de la décentralisation.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-04628847 , version 1 (28-06-2024)

Licence

Identifiants

  • HAL Id : hal-04628847 , version 1

Citer

Romain Lajarge, Laurence Malaret. Coopérations villes-montagnes : reterritorialisations en cours. Transitions, gouvernance territoriale et solidarités, ASRDLF; Sciences Po Rennes, Jun 2022, Rennes, France. ⟨hal-04628847⟩
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