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Communication Dans Un Congrès Année : 2024

Quand le secteur du bâtiment et des travaux publics rencontre celui de chercheurs-praticiens pour accompagner le prévention des abandons en formation professionnelle initiale

Résumé

Contexte et enjeux sociaux : les enjeux de la coopération En France, la formation initiale par alternance fait l’objet d’une attention particulière des pouvoirs publics. En mai 2023, le Président de la République a annoncé une réforme de la voie professionnelle fondée sur une importance majorée des périodes de formation en entreprise. Cette vision professionnaliste tend à faire de l’apprentissage en entreprise un modèle de réussite dont l’ambition serait de lutter contre le décrochage et favoriser l’insertion professionnelle. Cet objectif ne doit pas occulter que la place et les conditions de travail des jeunes alternants au sein des entreprises sont loin d’aller de soi. En effet, depuis des décennies, la lutte contre les abandons de formation constitue un objectif majeur pour les acteurs du monde apprenti (Kergoat, 2022). Depuis 1995, les taux bruts de rupture de contrats d'apprentissage restent constants (aux alentours de 25% jusqu’à 50% dans certains domaines) malgré les actions et moyens financiers considérables mis en œuvre. Ainsi, il parait fondamental de mieux comprendre les conditions de formation des apprentis et d’intervenir pour remédier à la souffrance engendrée chez cette jeunesse malmenée, soumise à une forte domination symbolique. Le dispositif « Devenir Pro » et les étapes de sa construction Dans le cadre de cette communication, nous proposons de témoigner sur les modalités de coopération entre notre laboratoire et deux organismes (CFA-BTP Occitanie et CCCA-BTP) en charge de la gestion et du développement des formations par apprentissage dans le secteur du bâtiment et travaux publics. Ce partenariat a permis la formalisation d’un dispositif de prévention des ruptures de contrat d’apprentissage intitulé « Devenir Pro. Pour un CFA et des entreprises partenaires de leurs apprenti.e.s », co-construit par des psychologues, des chercheurs et des acteurs de terrain. Son évaluation, par l’ensemble des partenaires, montre qu’il induit une réduction significative du nombre de ruptures, un changement dans le climat scolaire et une meilleure sécurisation des parcours. Son déploiement se fonde sur trois leviers d’intervention : groupes de parole pour les apprentis ; analyse de pratiques et travail collaboratif avec les équipes éducatives ; entretiens individuels avec les apprentis et les formateurs. Après 5 années de fonctionnement, ce dispositif déployé à titre expérimental fait l’objet aujourd’hui d’une demande de déploiement à l’échelon national auquel nous nous apprêtons à répondre à partir d’une nouvelle action de valorisation de la recherche consistant à créer une formation pour les acteurs du monde apprenti.es., proposée par notre université. Nous montrerons comment nous avons mis en œuvre une recherche-intervention pour engager un processus de changement au sein d’organisations dont la culture et le fonctionnement sont très éloignés de toute référence à la psychologie. La recherche-intervention comme mode d’accès à des « objets sensibles » Le recherche-intervention présentée trouve son origine dans la demande d’organismes qui assurent la gestion de nombreux établissements de formation. Soucieux de mieux comprendre le processus des ruptures pour accompagner de façon optimale les apprenti.e.s dans leur formation et ainsi limiter les risques d’abandons, ils ont sollicité le laboratoire Psychologie de la Socialisation – Développement et Travail, reconnu pour son expertise en la matière (Capdevielle, 2015). L’équipe de chercheurs a ainsi pu accéder à un milieu de recherche sensible et peu exploré pour enquêter et intervenir autour d’une problématique quelque peu taboue, caractérisée par des enjeux socio-politiques délicats. Le protocole de recherche-intervention a été planifié conjointement à partir d’espaces de dialogues variés où les savoirs de chacun sont mis en commun (via des entretiens collectifs, analyses de pratiques, etc.). Ainsi, les actions mises en œuvre ont été pensées ensemble, adaptées à chaque terrain selon leurs moyens et organisations propres, et ont évolué en fonction de l’expérience et de la collecte des données (notamment auprès des apprenti.e.s dans le cadre de groupes de parole). Engagement du chercheur et responsabilité sociétale La communication permettra d’interroger deux points en particulier : 1. les étapes qui ont permis aux chercheurs d’assoir leur légitimité en s’appuyant en particulier sur un transfert des résultats de la recherche vers le terrain et un travail de co-construction d’une réflexion théorique susceptible de soutenir la construction du dispositif proposé. Construire une intervention à partir d’une posture scientifique non familière aux acteurs de terrain et, de plus, en contradiction avec leurs cadres de références habituels, constitue un défi. Malgré leur souhait d’accéder au changement, la mise en œuvre de la recherche est venue ébranler des certitudes et a entrainé des remises en question. Sur ce plan, la création d’une équipe mobile de psychologues-praticiens formés par le LPS-DT a constitué un atout indispensable pour faire sa place et organiser la coopération. 2. la manière dont l’objectif d’efficacité qui sous-tendait la démarche du partenaire à l’origine de la demande a constitué le point d’appui qui a permis l’inscription du partenariat dans la durée. Cet impératif a eu pour conséquence de contraindre les chercheurs à se confronter à une logique plutôt quantitative, voire « marchande » très éloignée des fondements épistémologiques à partir desquels ils travaillent. Le déploiement de la démarche est devenu possible lorsque les acteurs de terrain ont constaté l’efficience du dispositif, y ont accordé suffisamment de sens, et ont souhaité opérer des changements dans leurs pratiques. Nous insisterons sur les enjeux éthiques posés par les risques d’instrumentalisation du dispositif formalisé et la façon dont le chercheur, engagé dans un processus d’accompagnement du changement, se doit d’adopter une attitude de flexibilité sans pour autant perdre le contrôle sur l’objet de recherche et les impératifs scientifiques indispensables au bon déroulement du projet. Bibliographie Capdevielle, V. (2015). Arrêter une formation par alternance. Les enjeux de la relation au maitre d’apprentissage. Diversité, 180, 100-105. Kergoat, P. (2022). De l'indocilité des jeunesses populaires. Apprenti·e·s et élèves de lycées professionnels. Paris : La Dispute.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-04620910 , version 1 (22-06-2024)

Identifiants

  • HAL Id : hal-04620910 , version 1

Citer

Valérie Capdevielle, Sandrine Croity-Belz. Quand le secteur du bâtiment et des travaux publics rencontre celui de chercheurs-praticiens pour accompagner le prévention des abandons en formation professionnelle initiale. Assises de la Recherche Pratiques et formes d'engagement dans la recherche : action silencieuse ou action revendiquée ?, Université Toulouse Jean Jaurès, Jun 2024, Toulouse, France. ⟨hal-04620910⟩
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