En cette époque de COVID, des fans de football même parmi les moins engagés se plaignent non seulement du fait que les stades se retrouvent vidés mais également d’un manque d’ambiance dans les tribunes. Les tentatives de pallier ce manque par l’usage de silhouettes en carton dans le stade ou encore par la mise en scène de supporters factifs ne peuvent en aucun cas remplacer la véritable expérience liée à la présence des supporters dans les tribunes du stade. Sans ses supporters, le football n’est rien de plus qu’un simple sport (cf. Fritsch 2020 : 1–4). L’élément central de cette expérience collective des stades est le chant ritualisé des supporters qui est un élément identitaire moteur. Ce chant collectif, orchestré par un leader de chant, en particulier par ceux qui s’identifient traditionnellement de manière particulièrement forte au club de football ((Giulianotti 2002 : 30–40) les appelle les supporters), crée et renforce un sentiment d’appartenance à une communauté (ancrée localement) de supporters de football, par opposition aux « autres ». Les chants de supporters ont deux fonctions centrales (cf. Bastian/Koch 2015 : 26–28) : d’une part, ils visent à apporter un soutien à sa propre équipe (« allez les bleus »), d’autre part, ils dévalorisent l’adversaire par des insultes ritualisées (« chants d’insultes ») (cf. Kopiez/Brink 2010 : 13–26). Nous procédons à une analyse exploratrice du contenu (cf. Mayring 2002 : 114–121) nous permettant de contextualiser les chants de supporters et ainsi de mieux comprendre les éléments clefs de l’identité collective. L’analyse porte particulièrement sur l’autodéfinition des supporters de football (tradition, références locales/régionales, taille et identification au club), leur groupe d’appartenance (inclusion/exclusion) et leur cadre de référence (rivalités locales/régionales ou traditionnelles). Les résultats montrent une tendance réelle des supporters à créer, à travers l’usage sémantique, une identité collective à l’exclusion de l’autre, à savoir les supporters peu engagés du même club de foot, et des autres, à savoir les groupes de supporters adverses.