Plus ancien théâtre fixe de la capitale, l’Hôtel de Bourgogne demeure encore mal connu en termes d’architecture. Le manque de documents chiffrés sur cette salle dans la première moitié du XVIIe siècle a conduit à un certain nombre d’interprétations divergentes quant à l’aspect et aux dimensions de ce théâtre dans son premier état. Cette lacune a conduit les chercheurs à privilégier des projets de reconstitution de lieux de spectacle parisiens plus tardifs, souvent focalisés sur les espaces spectatoriels, délaissant parfois la question des dispositions de l’espace scénique. Notre communication se propose d’exposer l’état actuel de la question, et présenter un chantier en cours consacré à la reconstitution de l’espace scénique de l’Hôtel de Bourgogne à l’époque baroque, croisant un examen minutieux de l’iconographie disponible avec les ressources de la modélisation 3D. Nous montrerons comment une comparaison en masse des représentations iconographiques de la scène de l’Hôtel de Bourgogne (les quarante-sept croquis scénographiques du décorateur Mahelot, ainsi que d’autres gravures de l’époque) permet une estimation plausible des dimensions et des caractéristiques physiques de cette scène, le recours à la modélisation virtuelle offrant une confirmation visuelle de ces hypothèses. La reconstitution du rendu visuel de plusieurs décors apporte ainsi de nouvelles données sur l’intégration de ceux-ci dans la structure architecturale de l’Hôtel de Bourgogne, et sur l’évolution des comédiens dans cet espace. Les possibilités de visualisation ainsi offertes permettent de valider certaines estimations théoriques antérieures, d’en écarter d’autres, et surtout de rendre toute leur valeur informative aux représentations iconographiques parfois jugées à tort comme « énigmatiques » ou « ne retranscrivant pas la réalité de l’espace ». Vingt ans après l’article pionnier de Christa Williford qui souhaitait que les chercheurs en histoire théâtrale puissent s’emparer de l’outil informatique pour bâtir leurs hypothèses, nous verrons que l’accès à la modélisation 3D, rendu possible par la démocratisation des logiciels, offre des prolongements inédits aux recherches iconographiques, en permettant notamment une distinction plus fine entre les conventions figuratives et la représentation du réel.