A l'heure où le paradigme de la transition envahit mais aussi brouille les perspectives sur l'action publique en faveur de la durabilité , ce travail veut contribuer à enrichir les travaux de narratologie consacrés aux politiques publiques locales. Il est dédié à la réflexion sur les conditions de la construction et d'utilisation, du point de vue des acteurs locaux, de récits d'action publique autour du vélo. Ce travail s'inscrit dans le contexte particulier des villes méditerranéennes marquées par une décennie de crises et de chocs d'austérité, par des transformations des équilibres politiques mais aussi par une percée rapide des thématiques de l'écologie urbaine. Nous ciblons la recherche sur une grande municipalité espagnole dirigée par une coalition engagée dans une promesse de renouvellement radical de l'offre politique (il s'agit de la troisième ville du pays, Valence, 800 000 habitants). En 2015, cette ville a connu une alternance de la droite (parti populaire) à une coalition de gauche, régionaliste, socialiste et verte qui a été confortée aux élections locales de 2019 pour un second mandat. La vie publique est placée par l'équipe municipale sous la bannière du changement : changement après un quart de siècle de politiques locales d'inspiration néolibérale et réorientation des politiques locales vers la durabilité et la participation. Dans ce contexte, l'objectif de ce chapitre est de déterminer la place et le contenu du récit d'action publique autour du vélo en ville et de la transition qu'il induit . En s'appuyant sur la production discursive des édiles associée à la création d'une quarantaine de kilomètres de pistes cyclables protégées en centre-ville, on cherchera à montrer les liens argumentatifs opérés entre cette opération d'urbanisme et d'autres récits portant sur la transformation concomitante de société et des valeurs publiques.