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Rapport Année : 2023

Préparer le droit spatial français aux nouvelles ambitions lunaires

Alban Guyomarc'h
  • Fonction : Auteur
Clarisse Angelier
  • Fonction : Directeur de publication
Laeticia Cesari
  • Fonction : Autre
Alexandre Chazelle
  • Fonction : Autre
Cécile Gaubert
  • Fonction : Autre
Quentin Gueho
  • Fonction : Autre
Numa Isnard
  • Fonction : Autre
Mathieu Luinaud
  • Fonction : Autre
Isabelle Tisserand
  • Fonction : Autre

Résumé

Depuis janvier 2023, le GT Objectif Lune de l’ANRT étudie les évolutions nécessaires pour adapter le droit français aux nouvelles ambitions lunaires, et notamment à l’utilisation à venir de ce corps céleste et de ses ressources. Car les missions lunaires du deuxième âge spatial, celles qui ont pour objectif une installation pérenne sur la Lune d’ici la fin de la décennie, partagent toutes des intérêts stratégiques, scientifiques et technologiques pour l’utilisation des potentialités offertes par notre satellite naturel, et notamment son sol et son sous-sol. À différents endroits du globe, des écosystèmes d’innovation émergent sur ce sujet : aux Etats-Unis et au Luxembourg, en Chine et en Russie ou encore en Inde et au Japon ; ainsi qu’au sein d’autres puissances spatiales, établies de longue de date ou émergentes. Néanmoins, l’utilisation à venir de la Lune n’est pas exempte d’incertitudes sur le plan juridique, et dans le champ du droit, le paysage stratégique évolue. Les flottements des textes internationaux (et notamment les imprécisions du Traité de l’espace et de l’Accord sur la Lune) ont ouvert une marge importante d’interprétation. Cette marge a semblé suffisamment grande pour que certains États décident d’investir le débat juridique au moyen de normes de droit interne. C’est ainsi que les États-Unis et le Luxembourg ont pu, par exemple, admettre des droits de propriété sur les ressources spatiales au travers de lois spatiales nationales. La plupart du temps, ces efforts juridiques sont également liés à une politique économique active sur des activités spatiales émergentes. Le paysage technologique évolue, le paysage juridique également : et à l’heure où la France dessine les contours de son engagement lunaire notamment via la signature des Accords Artémis, nous croyons qu’il est temps pour notre pays d’adapter à son tour son droit spatial aux ambitions lunaires, à l’image de son engagement marqué pour l’espace. Trois arguments servent notre propos : 1. L’encadrement de l’utilisation des corps célestes constitue un outil essentiel pour l’émergence d’un écosystème français d’innovation sur le sujet. Un régime de responsabilité et une délimitation claire du champ d’innovation correspondent à une demande forte des acteurs du secteur, alors qu’ils se lancent sur des segments déjà incertains. La première mission d’une rénovation du droit spatial français est donc d’équiper l’ordre juridique national sur des activités spatiales émergentes, tout en le rendant plus compétitif et plus attractif sur le plan international. Cette attractivité et cette compétitivité pouvant tout à fait être soutenue par une approche qui ne transigerait pas avec un impératif de responsabilité. 2. L’heure est au retour sur la Lune : celui des Américains et de leurs partenaires avec Artemis, celui de la Chine et de la Russie avec l’ILRS, celui d’autres Etats également, parmi lesquels l’Inde, le Japon ou les Émirats. Les ressources spatiales sont au cœur de ces ambitions – et leur encadrement juridique également. Compte tenu de ce contexte, il est important que la France, à l’instar d’autres États, prenne une position forte et déterminante sur l’utilisation des corps célestes via son droit. En se prononçant ainsi par son droit interne, la France pourra clairement exposer sa position sur une problématique juridique controversée. La seconde mission d’une loi nationale est donc de positionner la France dans le nouveau paysage stratégique international de l’exploitation des ressources. Ce positionnement français soutiendra une réflexion qui doit aussi être menée à l’échelle européenne, la France serait alors précurseur, au côté du premier Etat européen à s’être saisi du sujet, le Luxembourg. 3. À ce titre, le troisième argument est celui de l’opportunité de développer une approche française responsabilisante, avec une vision pondérée des enjeux, vectrice d’une coopération internationale en faveur d’une exploitation juridiquement régulée et durable des ressources spatiales ; une approche qui sait prendre en compte tant les intérêts des Etats spatiaux, que les intérêts des Etats non-spatiaux ou en train de développer des capacités spatiales. Seront peut-être aussi à considérer les besoins des générations futures, notamment dans les cas où l’utilisation des corps célestes concernerait des ressources non renouvelables. Sur le plan opérationnel, plusieurs options s’offrent à nous, pour réaliser ces adaptations. À l’instar du Luxembourg et des Etats-Unis, la stratégie suggérée par le groupe de travail aurait pu consister en la proposition de dispositions législatives dédiées à l’exploitation des ressources, avec un focus important sur la propriété desdites. Il a néanmoins semblé, au cours de nos travaux, que l’approche d’une loi unique dédiée aux ressources spatiales était inopportune sur les plans juridique et économique. Une autre approche semble plus opportune, celle non pas d’une loi nouvelle, mais d’une adaptation du droit français existant. Nous partons en effet du constat que des projets de révision de la loi sur les opérations spatiales (LOS) et de ses arrêtés techniques sont en cours. Nous suggérons alors, dans le cadre de ces révisions, d’élargir le champ d’application de la LOS en y adjoignant deux nouveaux types d’opérations spatiales : les opérations spatiales en orbite – qui rejoignent nos préoccupations en tant qu’enjeu actuel incontournable et en tant que brique utile aux ambitions lunaires – et les opérations spatiales sur un corps céleste. Cette proposition permet : • De remplir notre objectif initial : envoyer un signal favorable, par le droit, à l’émergence d’un écosystème d’innovation autour de l’utilisation de la Lune et des corps célestes. • De placer deux nouveaux types d’opérations spatiales sous l’égide d’un régime de responsabilité connu des opérateurs et réputé pour son exigence. Assez tôt par ailleurs, devra être traitée la question centrale du statut des données de cartographie de la Lune et du catalogue des ressources présentes sur le corps céleste. Ces éléments présentent un double intérêt, scientifique et économique. Scientifique, car il sont au cœur de la meilleure connaissance de notre satellite naturel, fondement des programmes lunaires contemporains. Économique, car il s’agit aussi d’opérations de prospection des ressources valorisables sur la Lune pour les différentes chaînes de valeur spatiales. Ce double intérêt se décline juridiquement à deux échelles. L’échelle internationaled’un e part : car il faut déterminer ab initio dans le cadre d’une coopération internationale, les modalités exactes de partage de ces données. L’échelle nationale d’autre part : car il faut réglementer en droit interne le régime de propriété de ces données, d’autant plus si elle est réalisée par des acteurs privés qui pourraient légitimement vouloir tirer un bénéfice de ladite cartographie. Cette approche n’est pas exclusive d’une réflexion ultérieure sur un droit de l’exploitation économique de l’espace, un droit qui comportera des dispositions, notamment sur la propriété des ressources

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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-04492718 , version 1 (06-03-2024)

Identifiants

  • HAL Id : hal-04492718 , version 1

Citer

Alban Guyomarc'h, Clarisse Angelier, Laeticia Cesari, Alexandre Chazelle, Katia Coutant, et al.. Préparer le droit spatial français aux nouvelles ambitions lunaires : ENCADRER L’UTILISATION DES CORPS CÉLESTES. ANRT - Association Nationale Recherche Technologie. 2023. ⟨hal-04492718⟩
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