Comme toutes les villes françaises, mais de manière plus remarquable encore, Nancy connaît de 1870 à 1914 un développement démographique important. De 50 000 habitants en 1866, elle passe à 70 000 quinze ans plus tard, pour atteindre les 100 000 habitants en 1901. En raison de l’annexion de l’Alsace-Lorraine en 1870, Nancy devient en effet la capitale de l’Est de la France. Accompagnant sa croissance démographique d’un essor économique important, la ville offre alors les éléments favorables au développement des activités de la construction. L’agence d’architecture André profite de ce contexte favorable et acquiert dès les dernières décennies du XIXe siècle une position dominante dans le cercle nancéien de la construction. Grâce aux liens qu’elle tisse avec les milieux influents, mais aussi à la transmission de son savoir-faire et de sa clientèle de génération en génération, elle assure la pérennité de l’affaire familiale et conserve son statut tout au long du siècle suivant. (Bauer, 2015) En prenant pour exemple cette agence dynastique d’architectes provinciale, nous examinerons ainsi comment se tissent les réseaux (leurs natures, leurs échelles, leurs influences sur les réalisations) et comment ils permettent d’entretenir, de développer et de transmettre une clientèle. Après avoir présenté l’agence André et les rapports de proximité qu’elle a créés avec deux autres grandes familles dynastiques nancéiennes, les Prouvé et les France-Lanord, nous étudierons comment les architectes André font évoluer leur réseau politique afin de bénéficier de la commande publique. Enfin, nous montrerons comment l’agence investit plus spécifiquement le niveau local dans sa conquête d’une clientèle privée, tout en utilisant l’échelle nationale et internationale pour entretenir sa notoriété.