Malmenées pendant toute la période de « modernisation » de la production agricole, aujourd’hui reconsidérées dans leurs dimensions à la fois agronomiques, environnementales et culturelles, les haies reviennent de loin. Les différentes contributions rassemblées dans ce numéro spécial visent à rendre plus compréhensible l’évolution des formes et des fonctions de la haie et à réfléchir aux conditions d’un maintien et d’une intégration durable de la haie dans les exploitations agricoles et les paysages ruraux. Ce dossier s’intéresse aux haies bocagères, qu’elles soient en zones agricoles, rurales ou péri-urbaines en tant qu’elles participent à plusieurs titres de l’amélioration des biens communs. Il met en perspective, à partir des travaux académiques replaçant la haie dans l’espace et dans le temps long des sociétés agraires, la parole des « praticiens des haies », qui depuis plusieurs décennies - et parfois contre vents et marées- contribuent localement par leurs actions au maintien et au développement des haies. Loin de « l’encombrant héritage » qu’ils ont pu représenter pour le monde agricole, les fonctions du bocage et des arbres champêtres sont aujourd’hui reconnues face aux risques engendrés par le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité. Après plusieurs décennies de désamour - les chiffres sont là pour l’illustrer - , c’est de l’indispensable transmission des savoirs et savoir-faire autour des haies dont il sera également question dans ce dossier, par le croisement d'expériences issues de l’enseignement agricole avec celles d’associations et d’acteurs de terrain. Cette requalification - encore timide - appelle à la fois à repenser le cadre de l’action publique locale (programmes de replantation régionaux ou locaux, par exemple), la coordination entre acteurs à l’échelle des territoires et à proposer des outils de gestion durable de la haie partagés par les agriculteurs, les particuliers et les collectivités locales (plans de gestions durables des haies, par exemple). C’est à cette réhabilitation que ce dossier propose d’apporter sa contribution.