Après une forte croissance initiale, le développement de l'aquaculture marine en Europe (UE) a montré des signes de stagnation, voire de régression dans certains Etats membre. Les facteurs explicatifs de cette stagnation ont souvent pris la forme de contraintes techniques, de maitrise des maladies et de gestion de l'environnement, de contraintes sur les facteurs de production (accès au capital, accès à l'espace, accès aux connaissances). A ces contraintes se sont ajoutées des conflits d'usage importants avec d'autres activités, tant pour l'accès aux ressources qu'au sujet d'impacts environnementaux subis ou émis. Cependant, les facteurs explicatifs se sont assez peu intéressés aux forçages socio-économiques, que ce soit à l'adéquation entre les systèmes productifs et les marchés, voire les modes de consommation, qu'à l'adéquation des développements aquacoles avec les territoires où ils prennent place. En outre, la croissance des productions s'est souvent accompagnée de difficultés grandissantes en termes de rentabilité des exploitations. Nonobstant ces enjeux et à la suite de la crise financière de 2008, la croissance bleue a été perçue comme une opportunité de développement aux travers d'une série de secteurs clés amenés à relancer l'économie et à fournir emplois et bien-être (EC, 2017). Parmi ces secteurs, l'aquaculture marine fait naître d'importants espoirs au travers de cette croissance bleue et sa déclinaison en politique maritime intégrée de l'Union européenne et de son outil de planification maritime (MSP). Vu comme un outil d'intégration, voire de gestion intégrée, la MSP est aussi avancée comme un facteur d'amélioration de l'acceptabilité sociale des développements aquacoles, notamment au travers du concept des zones dédiées à l'aquaculture (AZA), renforcées par des actions de communication visant à atténuer les perceptions erronées que les consommateurs et les citoyens pourraient exprimer au sujet de l'aquaculture et de ses produits. La stagnation des captures issues de la pêche, la demande croissante par capita en produits de la mer soutenue par une démographie mondiale toujours plus forte et confirmée par les différents modèles renforcent le rôle désormais dévolu à l'aquaculture de subvenir à cette croissance. Une revue des enjeux et des verrous au développement de l'aquaculture marine en Europe et dans le monde permet néanmoins de souligner un nombre important de contraintes pouvant obérer le développement souhaité, mais aussi un certain nombre de contradictions entre objectifs affichés et réalité des développements. Cette dynamique ancienne et attachée aux premiers développements liés à la révolution bleue semble toujours à l'oeuvre. Les mêmes causes conduisant aux mêmes effets, l'adéquation des objectifs assignés aux développements aquacoles avec une démarche de durabilité de ces développements est questionnable. Une revue d'expériences de développements au sein du projet H2020 MedAID permet de renforcer un constat initial portant sur le manque d'attention portée à l'adéquation des objectifs aquacoles avec les territoires qui les supportent, avec les marchés et leurs évolutions et les attentes des consommateurs. Si les solutions et innovations technologiques restent au coeur des développements aquacoles, ces contraintes soulignent leur caractère nécessaires mais non suffisants.