Ce texte est issu d’un mémoire de recherche en musicologie intitulé « Approche spinoziste de musiciens improvisateurs : Evan Parker, George Lewis, Jean-Luc Cappozzo », réalisé sous la direction d’Alvaro Oviedo et présenté à l’Université de Paris 8 en 2018. Je m’y proposais de mettre en relation la pensée du philosophe Spinoza avec les pratiques, productions et discours de musiciens improvisateurs, notamment au travers de la conception spinoziste de l’individu, laquelle, selon Charles Ramond, « se rapproche de celle du sens commun, en ce que les individus y sont considérés comme des composés, pourvus d’une unité de composition qui permet de les distinguer les uns des autres et assure leur permanence malgré les variations qui peuvent intervenir entre eux. Elle s’en distingue grandement, cependant, en ce que les individus y sont également considérés comme les composants d’autres individus. »1 La première partie du mémoire pose M, défini comme l’individu formé par le musicien et l’instrument, et s’attache au cas particulier d’Evan Parker et de son saxophone. D’abord, sa conception du saxophone comme instrument de connaissance est mise en relation avec la théorie de la connaissance de Spinoza ainsi qu’avec des notions de psychologie cognitive ; puis sa méthode instrumentale est qualifiée comme régressive et synthétique ; et enfin son travail en solo, enregistré sur le disque Monoceros, est analysé comme présentant deux traits caractéristiques de la pensée de Spinoza : l’immanence et la continuité.