À partir d’un croisement de regards historique et juridique, cette contribution explore la production de normes et l’évolution du contentieux en matière de santé au travail, à l’échelle d’un établissement sidérurgique implanté à Fos-sur-Mer depuis le milieu des années 1970. Ce secteur industriel particulièrement polluant, hérité du modèle productif des Trente Glorieuses, a exposé les travailleurs à des risques de maladies professionnelles qui ont longtemps été invisibilisés, en dépit de l’élaboration – non sans limites – d’un arsenal normatif visant à réduire les émissions toxiques. En s’appuyant sur un corpus de décisions de la Cour de cassation, le propos interroge de façon diachronique les modalités de mise en œuvre des protections, entre adaptation normative, transgression réglementaire, causalité des atteintes et réparation des dommages. Il invite, plus largement, à prendre en compte les risques relevant de la santé environnementale dans une perspective globale d’exposome, en raison de contaminations croisées dans les lieux professionnels, les espaces résidentiels et les milieux environnants.