Le Mans (Sarthe), Places du Cardinal Grente et Saint-Michel : rapport de diagnostic - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Rapport Année : 2023

Le Mans (Sarthe), Places du Cardinal Grente et Saint-Michel : rapport de diagnostic

Résumé

Au coeur du centre ancien du Mans, six sondages ont été implantés dans une vaste étendue de 6682 m2 qui entoure la nef de la cathédrale Saint-Julien. Ces emplacements ont été soigneusement choisis en tenant compte des connaissances préalables de la topographie historique, ainsi que grâce à une cartographie préliminaire réalisée à l’aide d’une prospection géophysique. Cette dernière a mis en lumière diverses maçonneries et anomalies, de même qu’une grande partie des réseaux, qu’ils soient en usage ou non, sillonnant cette zone et posant une contrainte significative. Les indices de datation des vestiges mis au jour permettent de distinguer au moins cinq phases principales d’occupation, s’étendant chronologiquement de l’Antiquité jusqu’à l’époque contemporaine. À l’exception des sondages situés au centre de la place Grente, où les maçonneries affleurent, les niveaux structurés se manifestent à une profondeur d’environ 0,80/1 mètre, parfois légèrement moins, et se présentent dans un état de conservation satisfaisant. Ils sont surplombés en grande partie par des remblais datant des époques médiévale et moderne. Les strates du Haut-Empire ne sont jamais atteintes en raison de leurs profondeurs, et le mobilier résiduel se révèle présent, quoique de manière modérée. La fortification tardo-antique est affleurante sous la couche de bitume actuelle. Le sol de circulation associé n’a pas été atteint. Le tracé et l’architecture de la courtine ne présentent guère de surprises, étant composée en majorité de moellons de roussard, parfois associés au calcaire, avec plusieurs rangs de briques. On retrouve également la mise en oeuvre de mortier classique et de mortier incluant des fragments de tuileau. L’absence d’indices concernant une tour suscite des interrogations. Les observations laissent entrevoir un dénivelé important, aujourd’hui estompé, entre la ville et la campagne environnante. La porte nord, ainsi que ses tours latérales, se situe donc soit davantage vers l’est, en direction de la tour Margot, soit vers l’ouest, en direction de la tour du Cavalier. À proximité de la croisée nord de l’église cathédrale, une fosse à ciel ouvert livre une importante quantité de faune et de reste végétaux ainsi qu’un pichet attribué à l’époque carolingienne. Plusieurs maçonneries médiévales sont également mises au jour, appartenant vraisemblablement à des constructions adossées au gouttereau et mentionnées dans les sources comme des boutiques appartenant aux chanoines. Un petit muret de grès roussard de forme hémicirculaire, découvert en profondeur dans un sondage, semble probablement être une composante d’un édifice de l’Antiquité tardive. Malheureusement, il n’a pas été possible de prolonger les investigations afin de mieux caractériser son contexte de découverte. À proximité du portail royal de la cathédrale, la mise en évidence de vestiges d’un malaxeur à mortier constitue une découverte d’importance. Ce type d’installation est habituellement associée aux grands chantiers carolingiens, et les occurrences à l’ouest du Rhin sont très rares. Bien souvent, ce dispositif de chantier s’avère spécifique à la période allant du 8e au 11e siècle, une datation qui semble corroborée par l’analyse céramique effectuée lors du diagnostic. Il est à rappeler que nos connaissances du fait urbain et de l’église au début du Moyen Âge sont limitées, seules les sources historiques (principalement les Actes des évêques du Mans) font référence à plusieurs chantiers qui pourraient être liés à cette structure. Au début de l’époque médiévale, dans la zone de la place Grente, le paysage urbain subit d’importantes transformations, avec un apport massif de remblais et la construction d’un bâtiment doté de solides fondations. Une partie de ces substructures trouve un support directement sur la courtine antique. S’il ne s’agit pas de la tour maîtresse de Guillaume, il est fort probable que les vestiges soient liés à cet édifice. Nous proposons également d’associer le fossé découvert dans le sondage 2 à cette phase. Cette structure défensive est totalement inédite et ne figure pas dans les sources écrites. Elle semble avoir été comblée au 17e siècle, ce qui est en accord avec la période de destruction du château, qui a débuté en 1617. Les tranchées de fouille menées pour le compte de la Société Française d’Archéologie au 19e siècle n’ont ni été retrouvées ni localisées par le géoradar. Toutefois, une anomalie géophysique de taille importante pourrait correspondre au talon de la tour dégagée au 19e siècle. À ce stade de nos connaissances, l’hypothèse la plus plausible est donc que la tour se trouvait à l’est de la place. Par ailleurs, des niveaux de circulation correspondant à une entrée de ville et datant du début du Moyen Âge ont également été observés. Une sépulture a été découverte à proximité de l’escalier du Jet d’eau, et elle semble appartenir au cimetière disparu des chapelains, dont la localisation correspond de manière approximative à la partie méridionale de la place Saint-Michel actuelle. Cette sépulture recreuse d’importants niveaux de remblais, accumulés relativement rapidement et parfois ponctués de fosses. L’ensemble révèle un mobilier médiéval, parfois précoce. Ces éléments pourraient être associés aux travaux de construction de la tour du beffroi de la cathédrale. Les couches les plus anciennes sont attribuées à l’époque carolingienne, dont une couche charbonneuse scellant l’arase d’un mur de conception antique, mais daté par radiocarbone également de l’époque carolingienne. Ce mur imposant, mesurant 1,60 mètre d’épaisseur, appartient à un grand édifice qu’il n’est pas encore possible d’identifier, bien que les sources écrites suggèrent de nombreuses possibilités, souvent liées au premier complexe épiscopal. L’étude des niveaux de remblai les plus récents démontre que l’ensemble de l’espace public a connu dès le 18e d’importants travaux de nivellement et de terrassement qui ont fait disparaître une partie de la stratigraphie. Les éléments datés de la fin du Moyen Âge ou du début de l’époque moderne sont rares. Il semble que les niveaux de circulation associés aient été détruits par plusieurs campagnes de travaux publics visant à embellir le quartier. On pense par exemple aux travaux préalables à la mise en place de l’escalier du jet d’eau par l’architecte diocésain Jean-Baptiste Lassus en 1853.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-04357218 , version 1 (21-12-2023)

Identifiants

  • HAL Id : hal-04357218 , version 1

Citer

Stéphane Augry, Jean-François Nauleau, Emmanuelle Coffineau, Aurélie Raffin, Morgane Sabatié, et al.. Le Mans (Sarthe), Places du Cardinal Grente et Saint-Michel : rapport de diagnostic. Inrap. 2023. ⟨hal-04357218⟩
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