Les outils informatiques, des scripts aux logiciels, sont devenus indispensables à la conduite de la recherche contemporaine. Si l’étude des instruments scientifiques a fait l’objet d’une ample littérature des études sociales sur les sciences, de même que les aspects liés aux données numériques, les logiciels sont étrangement absents. Cet article analyse le succès mondial des notebooks computationnels Jupyter pour contribuer à une étude sociale des logiciels sensible aux pratiques des outils numériques en science. Le projet Jupyter, initié en 2001 par un doctorant en physique intéressé par la programmation scientifique a progressivement évolué vers une infrastructure de la science des données mondiale. Je montre l’intérêt de considérer en détails la trajectoire de cet outil en identifiant les conditions toujours négociées du passage d’usages locaux à un rôle d’instrument générique, amenant progressivement son intégration dans une diversité de services au-delà des communautés scientifiques. La diffusion des notebooks computationnels a ainsi opéré non seulement une convergence entre code ouvert et science ouverte, mais aussi entre les pratiques de chercheurs et celles de développeurs informatique, amenant à la stabilisation d’une infrastructure spécifique pour le traitement des données.