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Ouvrages Année : 2023

Le destin contrarié de la décentralisation française

Résumé

Il n’est plus possible de cultiver l’illusion de l’univocité de la décentralisation française et de faire comme si les réformes qui se succèdent depuis deux ou trois décennies ne soulevaient pas la question fondamentale de la définition de la décentralisation elle-même. Il n’est plus possible d’ignorer les ruptures idéologiques qui la traversent, dont la conscience et la compréhension doivent être un préalable à l’opération de choix politiques éclairés. La décentralisation, en effet, n’est pas qu’une affaire de technique. Elle est fondamentalement politique dans le rapport qu’elle entretient aux notions d’État, de Nation et de territoire. Elle est un enjeu politique du fait de sa liaison à la question démocratique et à la représentation sociale et politique des citoyens. Elle soulève ainsi des questions qui ne sauraient être appréhendés sans compréhension d’ensemble et sans considération des différentes rationalités auxquelles sa construction se confronte. Pour le dire autrement, la décentralisation ne saurait être, sans s’exposer à de grands dangers, le fruit d’une élaboration inductive établie sans référence à des valeurs politiques définies servant clairement et explicitement d’objectif social. Elle suppose avant toute action de définir et d’assumer, selon un cadre qui demande un minimum de consensus, une conception d’ensemble reposant sur la considération de valeurs constitutives desquelles découleront, déductivement, les mouvements techniques de la décentralisation. L’inversion contemporaine du rapport entre politique et technique, dont on aura l’occasion de témoigner de quelques avatars, paraît de ce point de vue constituer l’une des révélations les plus manifestes de la perte du sens initialement donné à la décentralisation. Pour tenter de saisir les mutations de la décentralisation française, il a paru opportun d’envisager la manière qu’a notre droit de répondre à deux questions fondamentales : « pourquoi décentraliser ? » et « comment décentraliser » ? La première permet de souligner une rupture dans l’ordre des finalités du projet décentralisateur. La seconde permet, quant à elle, de signaler les grandes transformations connues dans l’ordre des moyens qui servent à fonder la décentralisation. Toutes deux permettent, depuis des points d’observation différents, de témoigner du véritable schisme qui traverse la décentralisation, au sein de laquelle cohabitent désormais deux conceptions radicalement différentes dans leurs fondements et dans leurs modalités d’expression et dont la coexistence concurrentielle, dans notre ordre juridique et dans le débat politique, constitue la source fondamentale de la perplexité que suscite généralement l’état présent de notre organisation territoriale. L’observation réalisée grâce à l’examen de ces deux questions permettra d’établir plus nettement comment le destin de la décentralisation française, initialement assez clair, s’est trouvé contrarié, en témoignant de la forme politique et juridique des dérives qui ont éloigné la décentralisation française de son projet initial et fondateur. Étude pour "Départements de France".

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Citer

Arnaud Duranthon. Le destin contrarié de la décentralisation française. , A paraître. ⟨hal-04296820⟩

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